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mercredi 18 novembre 2015 à 15:04

Du côté de la librairie…

Envie de lire… Après le 13 novembre




C’est peut-être dans ces étranges circonstances que la lecture, comme d’autres formes d’art, revêt toute son importance. Parce qu’elle est diverse, source de réflexion, d’amusement, de spiritualité ou de divertissement. Parce qu’elle est source de culture, parce qu’elle dissout l’obscurantisme, la lecture est aussi une arme contre l’ignorance, un bouclier contre la bêtise, une ouverture d’esprit pour voir plus loin et surtout voir l’autre. Ces jours, des gens sont tombés parce qu’ils vivaient libres et se divertissaient. Alors continuons à prendre des livres, à aller dans des expos, à chanter, à jouer, à rire, à réfléchir. Pour que personne ne soit tombé pour rien.

 

 

 

 

Belle idée de la part des Editions Grasset que d’avoir publié le dernier opus d’Harper Lee en même temps que la réédition de son précédent roman.. qui ont la particularité d’avoir été écrit à 50 ans auparavant, sans aucun autre livre entre-temps. « Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur » avant, en son époque, reçu le prix Pulitzer. « Va et poste une sentinelle » redémarre l’histoire de Jean Louise Finch, dite Scout, 20 ans après son départ de sa ville natale de Macycomn, Alabama, où elle a laissé son père Atticus, avocat ayant défendu un Noir faussement accusé de meurtre dans les années 50, et son presque fiancé Henry. Revenue pour les vacances, elle tombe des nues en découvrant une facette de son père idolâtré et et sa ville qu’elle ne soupçonnait pas. La ségrégation s’insinue sans qu’elle comprenne pourquoi ses proches ne réagissent pas, voire semblent cautionner le phénomène.

 

 

 

Sous ses prétextes historiques, l’auteure s’attache surtout à cette relation père-fille et à l’aveuglement qui peut résulter d’une mise sur un piédestal. Scout va devoir se forger sa propre opinion, quitte à « tuer » ce père dont elle ne semble plus rien comprendre. Une approche intéressante qui nous parle du monde et de la manière de rester entier avec ses propres idées, même si le second opus présente quelques longueurs.

 

 

 

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Harper Lee. Ne tirez pas sur l’oiseau moqueur/Va et poste une sentinelle. Paris : Grasset, 2015. 745 p./333 p. 22.90€/20.90 €

 

 

 

Un jeune africain, Isaac, arrive en 1970 aux Etats-Unis dans le cadre d’un échange universitaire. Il y fait rapidement connaissance d’Helen, une jeune assistante sociale qui va tomber amoureuse de lui, malgré la ségrégation qui règne à l’époque. Mais Isaac est-il vraiment Isaac ? Au travers des deux voix narratives qui vont alterner tout au long du roman, on découvre en effet un homme au passé douloureux, sans guère de perspectives dans son Ouganda en proie aux guerres civiles. Helen va parler de cet homme qu’elle admire, ainsi que le second narrateur, qui est un ami d’Issac resté au pays en pleine guerre… Et dont Isaac a pris le prénom pour lui rendre hommage. Au travers de ces pages, l’auteur revient sur le déracinement et l’assimilation dans un Amérique peu favorable aux couples mixtes. La question de l’identité est lancinante, avec cet homme qui prétend « être né avec 13 noms », mais auquel Helen fera confiance sans pourtant le connaître. Un beau portrait humain et historique avec cette petite ville américaine des années 70.

 

 

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Dinaw Mengestu. Tous nos noms. Paris : Albin Michel, 2015. 318 p. 21.50 €

 

 

 

« Avant facebook, il y avait le livre d’or ». Le livre d’or de la célèbre université d’Harvard compile, tous les cinq ans, les événements qui ont marqués la vie de ses anciens étudiants. Chacun doit parler de sa vie, de ses projets, de sa famille ; une sorte de page facebook grandeur nature, avec en prime un week-end pour se réunir entre anciens élèves. C’est ce que vont faire quatre amies qui partagaient vingt auparavant un appartement : Addison, peintre dont l’époux écrivain sèche devant une page blanche depuis 10 ans, Clover qui vient de perdre son emploi chez Lehman Brothers et tente d’avoir un enfant, Mia qui élève ses enfants aux côtés d’un mari richissime et Jane qui vient de perdre sa mère et a mis son mari français en « stand-by ». Avec conjoint et enfant, le quatuor va se reformer pour quelques heures et tenter de retrouver cette amitié. Au fil des pages, de nouveaux personnages s’intègrent aux décors à travers d’astucieuses présentations de ces fameuses mises à jour du livre d’or. L’ancien petit copain, la voisine lesbienne, l’ami de toujours décédé… chacun va jouer une partie de cette pièce grandeur nature où, comme sur facebook, on essaye de faire bonne figure en s’éloignant certaines fois d’une réalité trop crue et pas très affriolante. Un joli essai !

 

 

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Deborah Copaken Kogan. Le livre d’or. Paris : Cherche Midi, 2015. 504 p.

 

 

 

Etranger roman que Blasmusikpop, qui commence par une alléchante description de la chasse au… ver solitaire ! Dans la ville de Saint-Peter-sur-Anger que l’on ne saurait pas situer sur une carte d’Autriche, des habitants au parlé plus que rural cohabitent depuis des décennies. Johannes part un beau jour, laissant derrière lui femme et enfant, pour comprendre ce ver solitaire qui se promène dans ses entrailles et revenir médecin dans son village alpin. Deux générations plus tard, son petit-fils également dénommé Johannes, essaye de quitter les « barbares des montagnes », mais se révèle trop mauvais pour avoir son bac. Contraint de rester dans ce village de frustres, il va devoir organiser un match de foot qui va lui faire prendre conscience de certaines réalités qu’il n’avait pas perçues… Très bien écrit, ce livre reflète cependant une vie autrichienne assez archaïque, avec des références à une passé nazi pas si lointain qui semble perduré dans les mœurs des habitants, où la femme n’a pas vraiment de place. Autant l’histoire est amusante et bien troussée, autant le fonds peut laisser un goût un peu amer.

 

 

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Vea Kaiser. Blasmusikpop. Paris : Presses de la Cité, 2015. 524 p. 22 €

 

 

Pour clôturer cette chronique, un livre grinçant de la rentrée littéraire : « Ressources inhumaines ». Nous y découvrons une jeune stagiaire qui découvre le travail dans le monde de l’hypermarché. Sans compétence, elle découvre rapidement que tout le monde fonctionne avec les manigances des petits chefs, et devient aussi douée qu’eux à son tour pour accéder au Graal : être chef du rayon textile !

Assez pathétique, elle vit dans le désir de satisfaire ses chefs, pour son hyper et sans comprendre qu’elle n’est qu’un engrenage prêt à sauter au besoin. La vision est tellement cynique, tant sur le monde de l’entreprise que sur celui des travers humains, qu’elle semble presque peu crédible. Vingt ans plus tard, que reste-t-il de cette stagiaire ? Quelles illusions ou désillusions l’habitent encore ? A vous de le découvrir !

 

 

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Frédéric Viguier. Ressources inhumaines. Paris : Albin Michel, 2015. 282 p. 19 €

 

 

 

 



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