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jeudi 13 décembre 2018 à 06:21

Tribunal de police Montchanin Montceau

un téléphone qui ne pleurait pas mais qui nous fait sourire...






 

« Je maintiens que je n’avais pas de téléphone avec moi ce jour-là. Quand je fais une erreur, je le reconnais, mais les gendarmes aussi font des erreurs, hein ! »

 

Tribunal de police au TGI de Chalon ce mercredi 12 décembre. Tous les dossiers avec avocats* ont été renvoyés, ne restent que les comparants sans conseil juridique, et peut-être que cette femme aurait dû en prendre un…

 

 

Elle a la soixantaine droite et tonique. C’est une exploitante agricole qui sait ce que travailler veut dire, et elle maintient avec force, comme elle l’a toujours dit, que le 17 avril 2017, alors qu’elle avait marqué l’arrêt au volant de son Ranger au stop de la rue Schneider pour s’engager dans la rue du bois Bretoux, à Montchanin, elle ne téléphonait pas. « J’avais ma main là, comme ça », et elle mime pour le président Deruelle, le geste de celle qui s’accoude sur le rebord de la fenêtre, la main vers l’oreille. « Il aurait fallu fouiller ma voiture : on aurait vu que je n’avais pas de téléphone ».

 

 

Ce matin-là, les gendarmes sont postés devant la caserne des pompiers. « La vue est dégagée, il fait jour. La conductrice nous voit, elle pose son téléphone et démarre ». Ils l’interceptent 300 mètres plus loin, au rond-point. « J’ai été ensuite interrogée par la brigade de Buxy, mais j’ai bien dit que je n’avais pas de téléphone. S’il faut dire que les gendarmes ont raison, alors ma foi… » Le président reprend un procès-verbal : « Ce qui est gênant, c’est que vous reconnaissez… » Elle l’interrompt, vive et convaincue : « Mais non ! Je ne l’ai pas signé ! » Le juge lit : « Elle nous concède qu’elle avait un téléphone, mais qu’elle contestera ». « Ah non ! Je le jure ! (elle lève la main droite) Vu comment ils étaient placés, ils ont vu ma main comme ça. (geste de la main en coque sur la joue gauche, tout près de l’oreille) »

 

 

Le commandant de police qui siège pour le ministère public rappelle les articles du code de procédure pénale qui imposent qu’un procès-verbal soit régulier dans la forme et qui stipulent également qu’il appartient à la personne poursuivie d’apporter la preuve du contraire. « Le procès-verbal a une force probante particulière, conclut le commandant Gauthier qui requiert l’amende minimum. « Mais comment j’apporterai une preuve que je n’avais pas de téléphone avec moi ce jour-là ? » La prévenue en appelle au bon sens, mais la règle de droit en la matière ne laisse pas de place à ce bon sens-là, et « la déclaration du gendarme fait foi ».

 

Elle rend alors les armes, « ben voilà, que voulez-vous faire ? ». Le juge lui demande sa situation professionnelle et ses revenus. « Je déclare 575 euros par an, si ça peut vous aller. » Elle évoque le ministère public, « comme a dit le général ». Le commandant Gauthier, subitement paré des étoiles par une promotion aussi énorme qu’impossible, sourit largement, « je vous remercie, madame ».

 

Déclarée coupable, elle est condamnée à une amende de 90 euros, assortie, comme toutes les amendes prononcées au TGI de la petite ristourne du trésor public : moins 20 % si on paie dans les 30 jours.

 

 

FSA

 

 

*Les avocats du barreau de Chalon étaient en grève totale ce mercredi 12 décembre, comme l’écrasante majorité de leurs confrères sur le sol national,  Pour protester contre la réforme de la justice qui a été adoptée cette nuit, sans tenir compte des avis des professionnels du droit, par 88 voix contre 83. 

 

 

 

 

tribunal 2208172

 

 

 

 

 

 

 

 

 



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