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vendredi 8 février 2019 à 06:53

Gilets jaunes du Magny devant la justice…

Tout ça pour ça, acte 2



 

 




 

C’est une femme grande et charpentée qui s’avance à la barre, en ce jeudi 7 février, devant le tribunal réunit en chambre des comparutions immédiates. Elle est poursuivie pour outrages, le 22 décembre dernier, dans le cadre d’un regroupement se réclamant du mouvement des gilets jaunes.

 

 

Elle a déjà comparu, le lundi 24 décembre, au sortir de 48 heures de garde à vue. On peut lire ici le récit de cette comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité qui avait échoué https://montceau-news.com/faits_divers/511343-gilets-jaunes-du-magny-devant-la-justice.html. Remettre ça 6 semaines plus tard n’a rien d’évident pour elle, cependant son récit ne change pas : elle reconnaît avoir lancé « p’tit con » à un CRS ou à un gendarme, elle ne sait pas, qui, casqué, venait de lui assener un coup de matraque sur le bras pour qu’elle lâche la bombe de peinture qu’elle tenait à la main (« on avait fait des pancartes »). Le coup crée une ecchymose de plusieurs centimètres, photo et certificat médical en attestent, et elle ne nie pas avoir « réagi » avec vivacité sous le coup de la douleur.

 

 

Le commissaire de Montceau-les-Mines se porte toujours partie civile. Maître Marceau plaide qu’il « s’est senti visé par les insultes ». Il lit « elle m’a traité, ainsi que mes collègues, de petit con ». L’avocat rappelle le contexte, ce soir-là : les insultes ont volé, ainsi que des projectiles (mais plus tard, la prévenue était déjà interpellée). Bah, maître Gaunet trouve que tout cela n’est guère sérieux, et verse des photos à la procédure : l’homme visé n’était pas grand, or le commissaire Beausse, si (1.90 m). « Il aurait été judicieux, pour quelqu’un de cette fonction, soit de faire peu de cas de la réaction, soit d’y inclure ses collègues puisqu’il dit que ses collègues étaient concernés, même si ‘petit con’ ne s’adresse pas à un groupe. »

 

 

Christel Benedetti, substitut du procureur, revient, elle aussi, sur l’ambiance au rond-point du Magny, alors que la nuit était tombée et que la police procédait, après sommation, à l’évacuation de la RCEA. « Le coup sur le bras est un acte de désarmement, dans un contexte où l’on pouvait craindre des jets de projectiles. » Elle requiert un stage de citoyenneté, soit la peine proposée fin décembre. Oui mais : la présidente Verger avait interrogé la prévenue. « Vous confirmez que ce n’était pas le commissaire ? – Ah oui, je confirme. » La femme avait même ajouté : « petit merdeux, t’as pas honte de taper sur quelqu’un qui pourrait être ta mère ? », or le commissaire et elle sont de la même génération. A la barre, elle s’excuse : « J’aurais pas dû insulter, mais j’ai pas trouvé normal de me faire frapper sans raison, et c’est sorti comme ça. »

 

 

Et cette garde à vue de 48 heures ? « J’ai été humiliée, pour une femme c’est dégradant. » Maître Gaunet passera une seconde couche sur ce traitement pour le moins énergique (on vit dans une société qui adore les euphémismes, ndla), et il vilipende la façon dont le commissaire a procédé, déposant plainte dans son propre commissariat, « entendu par ses subordonnés ». « On ne peut être juge et partie, il faut lui rappeler le respect des procédures. »

 

 

Le tribunal requalifie « l’outrage à une personne dépositaire de l’autorité publique » en « outrage à une personne dépositaire de l’autorité publique non nommément désignée », ne reçoit pas la demande de constitution de partie civile, déclare la prévenue coupable et prononce une dispense de peine*. Tout ça pour ça, fin.

 

 

Florence Saint-Arroman

 

 

*Dispense de peine, à ne pas confondre avec la relaxe. La dispense de peine reconnaît la prévenue coupable d’outrages (elle-même a toujours reconnu avoir lancé « petit con » et « merdeux »), mais ne la condamne à aucune peine.

 

 

 

tribunal 2208172

 

 

 

 



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