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lundi 29 avril 2019 à 19:58

Tribunal de Chalon : un Gilet Jaune de Montceau…

..poursuivi pour violences sur la personne d'un fonctionnaire de police... relaxé !



 




 

 

Que d’histoires pour une bouteille d’eau ! De Cristalline, en plus !, dont le plastique est plus souple que celui d’une Badoit », précise maître Gaunet.

 

Un fonctionnaire de police a posé plainte contre un gilet jaune pour violences sur sa personne, trois de ses subordonnés sont avec lui pour se plaindre de rébellion. Audience de jugement ce lundi 29 avril.

 

 

Le 9 février dernier, la police est mobilisée pour assurer le maintien de l’ordre sur une manifestation de gilets jaunes à Montceau-les-Mines. En début d’après-midi, elle interpelle un homme vers le magasin Leclerc, et les manifestants, inquiets que l’un des leurs ait pu être arrêté, entreprennent de bloquer le fourgon. La police use de lacrymogènes, « c’est à ce moment-là qu’il y a un heurt », expose la présidente Pertuisot : une bouteille de plastique sur la personne d’un policier. Deux autres fonctionnaires de police corroborent ses dires.

 

« C’était un geste involontaire » soutient le prévenu, lequel fut immédiatement plaqué au sol. La rébellion : une policière écrit que l’homme faisait des moulinets avec ses bras, et qu’on n’a pas pu le menotter car il gardait ses mains contre son ventre.

 

 

Le prévenu a eu 4 jours d’ITT, « les photos sont bien plus parlantes »

 

 

Monsieur D., 45 ans, produit un certificat médical établi après sa garde à vue. « Au commissariat, tout s’est bien passé, dit-il, c’est quand ils m’ont sauté dessus que… » : 4 jours d’ITT, un traumatisme crânien, une plaie à la tête, une contusion au niveau de la ceinture pelvienne, hématome sur le bras droit, dermabrasions sur la hanche et le genou. « Et les photos sont bien plus parlantes », insiste maître Gaunet. « La bouteille a touché son bras, et là on m’a sauté dessus. Il ne restait qu’un fond d’eau, c’était sûrement pas pour blesser quelqu’un », explique le prévenu. La rébellion ? « Je n’ai pas résisté. Du moment qu’on a arrêté de me taper dessus et que j’ai pu respirer, ça allait mieux. » Les mains contre son ventre ? « C’était par réflexe de protection, j’avais pris trop de coups. » Le tribunal visionne deux extraits d’une vidéo versée au dossier par le prévenu.

 

 

« Saisir la justice pour ça c’est lui faire perdre son temps », « cette procédure n’est pas loyale »

 

 

Tssss, semble dire maître Marceau pour les policiers : « quand on veut se protéger, on protège sa tête. » L’avocat fait une démonstration du point de vue des policiers, « leur parole fait foi ». Absolument pas ! lui répond maître Gaunet, « en matière délictuelle – contrairement au contraventionnel – les PV ne valent que comme simples renseignements, d’autant plus quand lesdites victimes sont à la fois juges et parties. C’est la deuxième fois que le commissaire, se disant victime, diligente la procédure dans son propre commissariat : ce sont les gendarmes qui auraient dû le faire, et ainsi auditionner les témoins. Monsieur D. a tenté de porter plainte, mais les gendarmes lui ont répondu : ‘on a pour consigne de ne pas prendre les plaintes des gilets jaunes’. Que penser du témoignage d’un subordonné ? Je ne parle pas de mensonge, je parle de partialité. A mon sens on aurait pu laisser ce dossier, saisir la justice pour ça c’est lui faire perdre son temps. Jeter une bouteille en plastique quasiment vide n’a jamais constitué quelque chose de grave. Je sollicite que vous le relaxiez des fins de la poursuite, cette procédure n’est pas loyale. »

 

 

Relaxé

 

 

Le casier judiciaire du prévenu est vierge. Le tribunal prononce la relaxe au bénéfice du doute et déclare irrecevables les constitutions des 4 policiers comme parties civiles. « Gardez en tête ce qui a été dit au cours des débats, dit la présidente à monsieur D. Il y a matière à réflexion. »

 

 

Florence Saint-Arroman

 

 

« Matière à réflexion »

 

 

« Si tout le monde commence à faire comme ça, c’est alors la guerre civile »

 


L’homme arrêté vers le magasin Leclerc ne portait pas de gilet jaune, mais les manifestants l’ignoraient. La présidente : « Pourquoi ne pas laisser partir le fourgon ? –  Par solidarité, pour qu’on nous dise pourquoi il avait été arrêté. – Vous ne croyez pas que c’est à un tribunal de décider de la culpabilité de quelqu’un ? – On ne savait pas ce qui s’était passé, on croyait que c’était l’un des nôtres, c’était par solidarité. » Un des juges assesseurs : « Est-ce que porter un gilet jaune donne une impunité ? Si tout le monde commence à faire comme ça, c’est alors la guerre civile, l’état de nature, la justice se fait dans la rue ! Pourquoi empêcher ? – On ne voulait pas empêcher, on voulait savoir pourquoi. »

 

 

Le droit à la sûreté des personnes est un droit fondamental

 


Le substitut du procureur, Dominique Fenogli : « Le droit de manifester est un droit fondamental. Le droit à la sûreté des personnes l’est aussi, et dans la hiérarchie des principes, le second est supérieur au premier. Dès lors, si des débordements sont susceptibles de porter atteinte à des personnes, il faut recourir à la force publique, c’est légitime. » (Il avait requis 150 heures de TIG, regrettant que la vidéo de 40 mn ne permette pas de voir clairement ce qui s’était passé, « quand on filme, c’est ces moments-là qu’il faut capter, on en voit plein à la télé »)

 

 

« Contexte défavorable aux policiers, dossiers qui mêlent politique et passion »

 


Maître Marceau pour la police : « N’ième dossier inhérent au contexte social, qui mêle politique et passion. Les policiers ce jour-là sont environ une dizaine (pour 70 manifestants), dans un contexte qui ne leur est pas favorable. On les voit comme les bras armés du gouvernement alors qu’ils ne font que leur métier. On aura beau dire que les manifestants étaient calmes, etc., on entend bien sur la vidéo des outrages, des quolibets, des sarcasmes. »

 

 

« L’usage démesuré de la force n’est pas légitime »

 


Maître Gaunet pour le prévenu : « Les différents témoignages, d’où qu’ils viennent, ne contestent pas le heurt mais pour les uns ont touché le policier au bras, pour d’autres à la hanche, pour les policiers c’était au visage, pour ladite victime c’était à la nuque. C’était un geste involontaire. Vous ne devez pas connaître beaucoup de dossiers « gilets jaunes », si ce n’est à Montceau. A Chalon, tout se passe bien, au Creusot, ça va, aucun gendarme ne s’est plaint outrancièrement, mais à Montceau… Aujourd’hui le propos des gilets jaunes n’est pas de légitimer les violences envers les policiers, mais à l’inverse l’usage démesuré de la force n’est pas légitime. »

 

 

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Photo de l’interpellation

 

 

 



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