Du côté de la librairie…
Envie de lire… des livres de la rentrée littéraire 2015
Envie de lire…
des livres de la rentrée littéraire 2015
Après septembre, la grande date des éditeurs, c’est janvier. Pour bien commencer l’année, je vous propose un petit tour de piste des sorties littéraires qui m’ont tapé dans l’œil.
Tout d’abord, et pour changer, le journal intime sous forme de BD d’Agustina Guerrero : « Journal d’une emmerdeuse ». Un parcours imagé dans la vie de cette trentenaire immature, mais ô combien sympathique, qui nous assène au détour de quelques dessins des vérités sur nos réflexes « féminins », pour ne pas dire nos travers ! Un journal où elle raconte son amour pour Jandro qui lui prépare tous les matins son café au lait, avec une belle autodérision. Une lecture toute légère !
Premier thriller captivant aux éditions du Masque, avec le palpitant « The Young World » de Chris Weitz. Le scénariste de Twilight propose ici une intrigue dans un New York dévasté par un virus ne s’attaquant qu’aux adultes. Dans un monde désintégré, quelques ados vont se lancer dans une course mortelle pour tenter de trouver l’origine de la maladie et envisager une suite à leur vie. Une très belle réussite qu’on a du mal à lâcher, à faire lire à son ado !
Dans un tout autre style, « Sans prévenir » se lance à la poursuite du fameux « Nos étoiles contraires », best-seller 2014 des ados. Ambre et Francis, deux adolescents atteints d’un cancer, tombent amoureux l’un de l’autre et se raccrochent aux sentiments face à cette épreuve. Ecrit avec beaucoup d’humour, il s’attache à écrire le plus justement possible sur la maladie. Les fans adoreront ce Love Story, même s’il est un peu dommage d’enchaîner les romans sur le sujet.
« Le meilleur du monde » nous entraine derrière Jeanne, quarantenaire mariée qui retrouve son amour de jeunesse. A travers cette relation, elle se sent renaître et quitte tout pour retrouver Christophe. Mais petit à petit, elle découvre que ce nouveau monde, d’apparence merveilleux, n’est pas non plus celui qu’elle veut. A travers ce court roman, l’auteure nous conduit aux sources de notre vie : la recherche d’une raison, que l’on ne trouve peut-être pas forcément dans la réalisation de ses idéaux. Une histoire d’amour à mort, que l’on pourra aussi lire dans le roman de Nino Hartiscwili « Mon doux jumeau ». Là aussi, un retour vers le passé pour Stella et celui avec lequel elle a été élevée, Ivo, va conduire ces presque jumeaux à revivre une histoire familiale tragique et dévastatrice. Ce très bon et profond roman aborde des questions métaphysiques au travers d’une exploration sans concession, où toutes les formes de violences apparaîtront. Une belle réussite, bien qu’un peu rude.
Les éditions Lattès et Albin Michel nous proposent deux romans sur le thème de la discrimination aux Etats-Unis, à deux périodes différentes. « L’invention des ailes » nous transporte en 1803, en Caroline du Sud, où deux jeunes filles, l’une blanche et l’autre noire, l’une maîtresse et l’autre esclave, vont voir naître une amitié qui vont de battre pour affirmer leur droit de vivre. Sarah et Handful nous offrent là un bel exemple de ce que l’espoir et l’audace peuvent nous conduire à faire. « Un été à Bluepoint » se situe quant à lui en 1952 et relate les liens entre Hilly, fils d’un riche avocat juif, et de Savannah, la nièce de leur « boy de couleur ». Ce premier roman nous plonge au tréfonds des relations amoureuses, familiales, sociales, avec cet arrière-plan de classe social dont il est difficile de s’extirper. J’avoue un vrai coup de cœur pour ce premier roman, qui nous plonge dans cette atmosphère si particulière des années 50 aux Etats-Unis, avec des promesses de rêve et une ambiance très Gatsby. A lire absolument.
Proposition de rentrée chez Actes Sud : « Berlinoise ». Curieux roman, presque poème, il invite le lecteur à retourner à Berlin le 30 décembre 1989, au pied du mur, à l’occasion d’un réveillon décisif pour Stan et Pascal. Ils y croisent Maya, fille solaire et vivante, qu’ils vont suivre dans cette ville en pleine réconciliation. La cité et la femme vont rapidement se confondre, entrainant à leur suite les deux jeunes en quête d’utopie. Très poétique, le texte s’étend dans une langueur démentie par la palpitation de Berlin, dans une attente du corps de l’autre et une recherche de la réconciliation, tant nationale que sensuelle. Un roman presque initiatique.
Pour terminer, une histoire de vie(s) sous la forme d’un court roman « Dix-sept ans », de l’âge de la narratrice (et auteure du livre) lorsqu’elle a avorté. Cet acte que tant de femmes ont tu, elle le dépose de manière très pudique sur ces pages, expose son trouble, son désarroi, le pourquoi de cette décision avec laquelle elle vit depuis 30 ans. Une délicatesse pour parler de l’avortement qui n’est pas « un beau sujet de littérature », mais pourtant un sujet ô combien humain.
Agustina Guerrero. Journal d’une emmerdeuse. Paris : Marabout, 2015. 17,95 € / Matthew Crow.
Sans prévenir. Paris : Gallimard, 2015. Coll. Scripto. 307 p. 11.90 € / Virginia Bart.
Le meilleur du monde. Paris : Buchet Castel, 2015. 149 p. 13 € / Chris Weitz.
The Young Word. Paris : Editions du Masque, 2015. 370 p. / Sue Monk Kidd.
L’invention des ailes. Paris : JC Lattès, 2015. 475 p. 22 € / Stuart Nadler.
Un été à Bluepoint. Paris : Albin Michel, 2015. 421 p. 22.90 € / Nino Haratischwili.
Mon doux jumeau. Paris : Libella Maren Sell, 2015. 360 p. 23 € /
Wilfried N’Sondé. Paris : Actes Sud : 2015. 172 p. 18 € / Colombe Schneck.
Dix-sept ans. Paris : Grasset, 2015. 90 p. 10 €
Véronique Décrenisse-Kieny