Justice – Violences, insultes, outrages, menaces de mort contre des policiers à Saint Vallier
6 mois de prison dont 4 mois assortis d’un sursis mis à l’épreuve de 2 ans ......
Le 9 août dernier on fêtait la Saint-Amour, sur le calendrier du moins, parce qu’à Saint-Vallier, au domicile d’une jeune femme qui hébergeait son compagnon, l’amour achevait de se dissoudre dans les crises de nerfs, et les policiers qui ont dû intervenir en sont sortis avec des jours d’ITT.
« Ils sont plus amochés que le prévenu », dira maître Marceau qui intervient à l’audience pour eux. Le prévenu a le bras gauche en écharpe. Arrêté le soir même, il est jugé ce lundi 13 août selon la procédure de comparution immédiate.
André X, 32 ans, est né à Lyon, et ses séjours en hôpitaux psychiatriques et établissements de soins se sont faits essentiellement là-bas. Il rencontre une jeune femme de Saint-Vallier, s’attache à elle et vient la rejoindre. Elle est sous curatelle, elle n’est pas à l’audience. Le 9 août au soir, elle accueille la police en bas de son immeuble : elle veut qu’André s’en aille. Il parlait de la tuer et d’égorger son chien. Il a un couteau à cran d’arrêt.
Trois policiers montent à l’appartement et y trouvent un André déchaîné, hors de lui, qui hurle « embarquez-moi ! Embarquez-moi ! » mais ne tend pas les poignets. Il va dans la chambre, s’assied sur le lit, et veut plonger la main dans un sac à dos. Un des policiers, prévenu d’une possible arme blanche, arrête son geste : il faut s’assurer du contenu du sac. André, un grand type maigre, se relève brusquement et lui porte un coup au cou (qui donnera un hématome). On décide de l’interpeller, mais l’échalas donne des bras et des pieds, c’est la mêlée, on finit par le menotter. Insultes, outrages, menaces de mort (« mange tes morts, je vais te tuer, je vais t’enlever la vie »), il continue au commissariat, il traite la femme de l’équipage de « putain ».
La garde à vue est compliquée parce qu’André ne se calme pas. Surprise : son alcoolémie est négative.
« Moi, je suis malade des nerfs, et depuis 3 ou 4 jours on ne faisait que s’engueuler. Elle arrêtait pas de me monter les nerfs. Elle faisait que me monter, me monter, me monter… » Et il fait des moulinets avec sa main valide à l’appui de cette mauvaise mayonnaise qui a pris lentement mais sûrement. « J’ai vu rouge. » Les insultes aux policiers ? « Je voyais rouge. » Les menaces de mort ? « Pareil. » Et, au commissariat, « ils continuaient à me monter les nerfs ». Aujourd’hui, calme, il regrette. Il le dira plusieurs fois, et répétera vouloir indemniser les fonctionnaires de police, il s’excuse, oui, il s’excuse. Le 10 août, André X a été placé en détention provisoire : « Normalement je ne devrais pas aller en prison, mais en psychiatrie. » On trouve de tout, à ce carrefour sensible entre judiciaire et psychiatrie : André X est épileptique, dépendant de la drogue (consommateur, il est depuis 10 ans sous Subutex), et puis « malade des nerfs », et il a fait « beaucoup de tentatives de suicide ». Il dit « TS », il connaît. Il prend 5 médicaments par jour, et le Subutex.
Avait-il pris son traitement au moment des faits ? Apparemment non, parce que « madame Y m’avait mis hors de moi ». Il voyait pourtant un psychiatre à Saint-Vallier, il n’avait pas coupé ce pont-là, l’habitude sans doute, qui tisse son existence. Dans le même temps, on remarque qu’il a un casier, portant au moins 8 condamnations pour violences en réunion, rébellions, outrages, menaces de mort, vols avec violences, conduite sans permis.
Il est reconnu handicapé à 80 %, il n’est pas irresponsable pénalement pour autant, et a concocté le 9 août dernier, vraisemblablement poussé à bout dans une spirale qu’il connaît pourtant et dont il n’a pas su sortir à temps, « un pot-pourri de toutes les infractions qu’on peut commettre sur les personnes dépositaires de l’autorité publique ». Pourri pour lui, pourri pour l’équipage. Les policiers le disent parfois : on assiste rarement aux interpellations, on n’est pas là pour voir et ressentir la violence qui se déchaîne sans plus aucune mesure. On n’est pas là pour essuyer la tension nerveuse, les insultes, les crachats, les gardes à vue dans le rouge elles aussi, les auditions quasi impossibles. Les policiers sont souvent aux prises avec tout ça. Un « tout ça » imprévisible, éprouvant, parfois éreintant, voire usant.
« Les policiers ne sont pas là pour ça », rappelle Aline Saenz-Cobo, vice-procureur. Ils ne sont pas là pour servir d’exutoire aux gens, quels qu’ils soient. Elle requiert 8 mois ferme avec maintien en détention. Maître Sarikan, pour la défense d’André X, rappelle que tout est parti d’un « quiproquo » : il allait quitter les lieux, il voulait prendre son sac, et c’est parti en conflit. « Monsieur est malade, il souffre, sa conjointe est sous curatelle, ce sont des cas sociaux, comme il a été dit. » Le prévenu s’excuse, il va indemniser, dit-il encore. Pendant le délibéré, il écarquille les yeux, il les fait tout blancs. Il semble triste, à tout le moins il ne fronde pas. Pas de morgue, pas de rires discrets avec son escorte, il attend, il doit mouliner des trucs dans sa tête.
Le tribunal le condamne à 6 mois de prison dont 4 mois assortis d’un sursis mis à l’épreuve de 2 ans avec obligation de soins, d’indemniser les victimes à hauteur de 400 euros chacune et 600 euros pour leurs frais de justice. André X est maintenu en détention pour les 2 mois ferme. Il salue le tribunal en sortant.
FSA