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jeudi 6 août 2015 à 06:24

Nouons le dialogue

Suite à notre article sur la venue d’Emmaüs



 

 

Je le dis haut et fort, Chimel à raison. C’est bien qu’Emmaüs viennent enfin à Montceau, c’est bien que des friches industrielles retrouvent un usage, ce serait mieux que l’on crée des entreprises industrielles, des emplois industriels. Mais en attendant c’est tout ce qui est possible.

 

 

 

Et si Chimel à raison sur le télescopage entre les reliefs des trente glorieuses et les cautères que notre société pose sur ses blessures mal soignées, il faut voir aussi que le tissu industriel n’est pas le seul à être usé jusqu’à la trame et remplacé par du synthétique. Nos centres ville se dévitalisent comme des dents cariées en perdant leurs commerces de proximité qui sont remplacés par des services. Il n’y a aucune plus value apportée par rapport à la disparition des commerces. Ça d’abord été banques et assurances. Tant et plus que dans certaines villes, et pas des moindres, on en est venu à règlementer l’implantation de services en centre ville pour éviter une certaine désertification.

 

 

 

Amiens, par exemple, n’a pas hésité à modifier son plan local d’urbanisme (PLU) afin de bloquer, à compter de janvier 2016, l’installation de nouvelles banques ou d’assurances sur l’axe principal du centre-ville.

 

 

 

Toulouse signe une charte avec les banques afin de « renforcer la dynamique commerciale et l’attractivité du centre ville et des quartiers./… les commerces des faubourgs et des cœurs de quartiers sont (aussi) fragilisés par l’évolution des modes de consommation et par la hausse des activités de service au détriment du commerce de proximité»

 

 

 

A Compiègne, l’Agglomération de la Région de Compiègne (ARC) a été primée pour son projet de cœur d’agglomération et le futur pont urbain qui en est un élément central. Retenue comme pôle d’excellence avec un prix spécial « Mobilité, transport, accessibilité » l’ARC essaie ainsi de pallier aux effets centrifuges des zones d’activités périphériques et à la forte fragilisation du commerce de centre ville.

 

 

 

Aux Assises du centre-ville, qui se tenaient à Dijon il y a eu unanimité des professionnels et des élus sur un point essentiel : les centre villes ont besoin d’être « reboostés » non seulement sur le plan économique mais aussi sur celui du lien social, de la proximité.

 

 

 

Après les banques et les assurances maintenant les dents creuses sont bouchées avec des magasins d’optique ou des opérateurs téléphoniques. Surtout avec ces derniers il y a un effet de chalandise drainant sur le centre ville. Il suffit de se promener rue Carnot à Montceau.

 

 

Nous pouvons aussi citer les ingérences conjoncturelles et souvent éphémères des négoces de métaux précieux (crise économique oblige), des ongleries (ô le beau piège du franchising), des centres de vapotages (luttons contre le tabagisme), etc. Quand l’éphémère fait clignoter les vitrines entre noms d’échoppes et panneaux d’agences immobilières.

 

 

 

Tout le monde est conscient que l’activité économique conditionne la vie des villes et des villages et que pour ces derniers l’emploi et son maintien sur le territoire assure la pérennité des services publics, la conservation des écoles, etc.

 

 

 

Il faut quand même revenir en arrière pour comprendre comment nous en sommes arrivés là.

 

 

 

D’aucuns mettent en avant la recherche du moindre coût de production et donc une migration des activités vers le sud.

 

 

D’autres expliquent la désindustrialisation par la marche en avant de la société occidentale ayant satisfait ses besoins et cherchant donc son développement ailleurs.
Certains accusent la mondialisation et son moteur le capitalisme pendant que beaucoup relaient le message de la libre entreprise, du libre échange et de l’absence de régulation.

 

 

 

On se souvient des crises anciennes du textile, de la métallurgie, du charbon qui ont amené leurs cohortes de drames et de faillite de pans entiers du territoire. Là nous sommes dans des convulsions mondiales, des redistributions nord sud, des périodes de moindre demande d’économie primaire.

 

 

Mais ce n’est plus ce qui à l’heure actuelle continue de plomber l’économie essentiellement financiarisée.

 

 

 

Sur dix ans, à partir de l’an 2000, en ce qui concerne les exportations, la France a connu le plus fort recul des pays de la zone euro. L’écart entre la France et l’Allemagne n’a cessé de se creuser pour atteindre environ 250 milliards d’euros soit 13 % du PIB.

 

 

 

Si dans toute la zone euro la part de la valeur ajoutée de l’industrie manufacturière dans le PIB a nettement reculé de 3,7 points, dans le même temps la France, cette part a perdu 5,2 points. On parle de 100 milliards d’euros.

 

 

La Direction générale du Trésor a publié une étude démontrant que la contribution de l’industrie à la richesse nationale est passée depuis 1980 de 24 % à moins de 14 %.

 

 

 

Quand on parle désindustrialisation il faut distinguer ce qui revient à la recherche du moindre coût avec les délocalisations, et ce qui ressort de l’abandon des productions dites non rentables.
De toute façon nous nous trouvons pris dans des stratégies économico-géo-politique sur lesquels les politiques n’ont que peu de prise.

 

 

 

Pour autant il ne faut pas nier le rôle des politiques dans le phénomène purement national.

 

 

D’abord les délocalisations. Avec Montebourg est apparue une théorie de la relocalisation. Et il existe des exemples patents.

 

 

 

Mais lorsqu’on lui parle relocalisation en France, Alain Madelin explique que « Tout d’abord il faut bien dire que la peur des délocalisations n’est pas fondée et la désindustrialisation est toute relative. Si on regarde les chiffres, nous n’avons pas une désindustrialisation plus grande que celle des autres grands pays, elle est surtout liée à la montée de la part du tertiaire dans l’économie, mais aussi au fait que beaucoup d’activités qui étaient hier à l’intérieur de l’entreprise industrielle sont, aujourd’hui, en voie d’externalisation. Indiscutablement les Chinois peuvent faire des choses moins chères que nous, c’est vrai. »

 

 

 

Les privatisations ensuite. Il ne faut pas penser que ces dernières sont le seul fait de la Droite, comme les nationalisations seraient uniquement l’œuvre de la Gauche. On peut nier tout lien entre privatisation et désindustrialisation, pourtant dans les faits, et ils sont têtus, il en existe bien un.

 

 

Dans le classement des « privatiseurs » nous trouvons Lionel Jospin (1997-2002) en tête. Etonnant non ?!? (aérospatiale-Matra et Usinor-Sacilor intégralement privatisés, ouverture du capital de France Telecom et de la CNP, cession d’actifs d’EADS, AXA-UAP, Total, Pechiney).

 

 

Ensuite nous trouvons, relativement loin derrière, De Villepin et Balladur. Ces privatisations entrainent par le jeu de la financiarisation de l’économie et par l’externalisation des activités et des productions à une réduction de la part de l’activité industrielle dans notre PIB

 

 

Mais honnêtement ne nous sentions nous pas flattés lorsque l’on nous présentait notre avenir en col blanc plutôt qu’avec les ongles noirs ? Nous appartenions dorénavant à la société des loisirs et des services, nous nous étions enfin élevés bien au dessus du niveau de nos parents.

 

 

 

Dans le même temps comment voulons-nous sauvegarder, maintenir et développer des emplois alors que les conditions économiques et nos modes de consommation nous poussent toujours plus vers le moins cher, destructeur d’emplois dans notre pays ?

 

 

 

La crise jointe au système économique mis en place avec l’Euro accroit encore trois phénomènes dont les ONG et les structures comme Emmaüs, le secours populaire, le secours catholique, la croix rouge s’occupent.

 

 

 

Il faut bien distinguer les notions de précarité, de pauvreté, d’exclusion. Dans le langage courant nous avons tendance à tout mélanger, par facilité, pour décrire ce que nous pensons être trois aspects d’un même phénomène.

 

Pourtant il s’agit de trois situations différentes, aux causes et effets différents.

 

 

 

L’incapacité (ou l’impossibilité matérielle) pour soi ou sa famille, autant dans le domaine social qu’économique, de jouir de ses droits fondamentaux et d’assumer ses responsabilités élémentaires résume la précarité.

 

 

 

C’est le niveau de vie qui définit la pauvreté. On parle là de niveau de vie inférieur à 950 € par mois en France. La population concernée n’est pas en position de précarité. On vit mal dans ce cas mais l’on peut exercer la totalité de ses droits et assumer ses responsabilités élémentaires, mais c’est sur, on vit mal.

 

 

 

L’exclusion sociale est la conséquence soit d’une absence de droits attachés à la situation sociale de la personne, ou soit d’une ignorance de ces droits. Il peut aussi s’agir d’une désocialisation, d’une perte totale d’énergie ou d’autonomie, pour faire les démarches nécessaires en vue d’obtenir des aides en matière de revenu, logement, école, santé.

 

 

 

Bien sur la perte d’emploi, le chômage de longue durée, la désocialisation, le marasme économique peuvent mener à la précarité et à l’exclusion sociale. Bien sur les dispositifs publics en place ne permettent pas de « réinsérer » tout le monde.

 

Alors, comme pour boucler le cercle vicieux, on installe les structures telles que la communauté d’Emmaüs dans les friches industrielles.

 

 

Chimel a raison, il y a des raccourcis malheureux qui sont l’indice de longs cheminements.

 

 

 

En même temps, comme le dit Roussillon, la venue d’Emmaüs à Montceau « C’est une bonne nouvelle…! »

 

 

 

Gilles Desnoix

 

 

 

 

 

 

gilles 0608152

 

 

 



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Un commentaire sur “Nouons le dialogue”

  1. Babs210 dit :

    Avec 950euros par mois ce n’est pas de la précarité ? On peut assumer toutes ses responsabilités (loyer, assurances, factures d’électricité, d’eau, de santé, et -éventuellement- nourriture ) ? je vous dis un mot : chiche !!! Je vous engage à passer un mois avec cette somme et d’en reparler ensuite…