Tribunal de Chalon – Correctionnelle une affaire de violences sur sa compagne à Saint-Vallier…
... prison avec sursis pour l'auteur des faits mais...
« Je sais qu’il n’est pas mauvais, qu’il aime les enfants, c’est pas mon ennemi, mais il est violent et je voudrais qu’il se soigne. » Fabienne et Abdel s’aiment depuis 12 ans.
Ils ont 2 filles, la dernière a 15 mois. Fabienne a aussi une grande de 12 ans, et Abdel se considère comme son père, puisqu’il l’élève. Hier lundi 25 septembre, la justice a séparé les conjoints.
Vendredi dernier vers midi à Saint-Vallier la grande de 12 ans, réfugiée avec le bébé chez une voisine, a appelé au secours sa grand-mère, et la police : dans la maison d’à côté sa mère et son beau-père s’étaient empoignés et roulaient au sol.
Ce jour-là tout a commencé, comme à chaque fois sans doute, par une dispute. La pré-ado n’avait pas rangé sa chambre, le beau-père voulait la punir, la mère s’est interposée, ils se sont « lancé des piques ». « Je me suis emballé, raconte Abdel, 30 ans. J’ai envoyé un petit plateau en bois contre le mur. Elle m’envoyait des piques sans cesse, elle sait piquer, elle le dit elle-même. Elle m’a dit ‘t’es un bon à rien, personne ne t’aime’, des trucs qui dévalorisent. Alors j’ai jeté ma tasse de café mais elle a ricoché et elle est tombé sur le bébé qui était dans les bras de sa mère. Je ne visais pas ma petite, je le regrette. J’ai voulu aller voir ma fille, mais Fabienne l’a donnée à la grande, et elle m’a sauté dessus, m’a griffé le visage. »
« Je suis sûre qu’il ne visait pas sa fille, affirme Fabienne, mais la tasse s’est cassée sur son bras et j’ai perdu mon calme. »
Jusqu’ici on serait presque dans de l’ordinaire qui dérape : les deux sortent de leurs gonds. Mais Fabienne poursuit, et l’on apprend que le dérapage faisait l’ordinaire chez eux : « Il m’insulte de pute, de merde, tous les jours. Il dit ‘tu n’as pas peur de moi, ce n’est pas normal’, moi je veux une relation normale, sans violences. Je voudrais qu’on soit aidés. Je ne veux pas qu’on l’enferme, mais je culpabilise de la situation de ma famille, je ne veux pas que ça soit à cause de moi qu’il aille en prison. J’aimerais qu’il ait un suivi, il ne voit plus rien quand il est énervé. »
« Ce sont des violences conjugales graves », doit préciser la présidente Grosjean à cet homme et à cette femme qui n’en semblent pas tout à fait conscients. Abdel soutient qu’il n’a pas étranglé sa femme, et la juge lui rappelle qu’elle en portait des traces autour du cou.
Maître Chavance va pointer au cours de sa plaidoirie quelques écueils relationnels : une relation « fusionnelle » entre la mère et sa fille aînée qui interdit à Abdel de prendre une place de père, le fond de frustration en Abdel qui le fait réagir plutôt que réfléchir à ce qui le prend. Autant de points qui seraient à interroger et à transformer, si…
« Madame veut pardonner, dit le procureur Prost, mais il n’est pas admissible qu’elle ait à subir cette violence répétée. Il est important de protéger la victime, fut-ce malgré elle. »
En effet, Fabienne, qui a la charge de 3 enfants, ne souhaite pas de séparation, elle veut juste que ça change. Ils ont déjà expérimenté la relation avec des domiciles séparés et ça allait très bien dans ces conditions. Abdel, lui, qui pourtant convient avoir des difficultés à se canaliser et faire du sport « pour se défouler », veut la séparation…
12 ans d’un lien compliqué et anormal au regard des lois qui régissent ici les relations humaines vont s’achever d’un coup dans la salle d’audience.
Le tribunal déclare Abdel coupable : de violences sur sa compagne et son enfant, le condamne à 6 mois de prison avec sursis assorti d’un suivi mise à l’épreuve de 2 ans, avec exécution provisoire, cela signifie que tout commence à l’instant : interdiction de paraître au domicile de madame, interdiction de tout contact avec elle, un stage de prévention aux violences intra-familiales et des soins. « Quand les relations sont toxiques, il faut arrêter le toxique », conclut la présidente.
FSA