Autres journaux


mardi 21 avril 2015 à 05:00

Du côté de la librairie…

Envie de lire… A propos de 39-45



 

 

 

Envie de lire…

 

A propos de 39-45

 

 

 

La commémoration de la fin de la Seconde guerre mondiale arrive. Les deux prochaines chroniques littéraires porteront donc sur cet événement et la littérature, rééditée ou non, qui parait à cette occasion. Des lectures pour se souvenir et réfléchir à l’avenir.

 

 

 

 

 

Avant même le début de la Seconde Guerre mondiale, la prise de conscience de l’avènement du mal qui allait gangréner le monde entier avançait dans l’esprit de Thelka Jansen, jeune institutrice allemande confrontée à l’obligation d’enseigner l’idéologie fasciste, tout en tentant d’empêcher ses jeunes élèves de s’enrôler dans les jeunesses hitlériennes.

 

 

 

Remplaçant une institutrice juive mise à l’écart, elle jongle entre auteurs interdits, cartes murales dévoyées, poèmes patriotiques. Les enfants deviennent des délateurs, détruisent les livres interdits et s’endorment au son de discours lénifiants. Thelka aura bien du mal à se faire son opinion. Un beau livre à lire pour mieux comprendre à quel point un discours extrémiste lié à des peurs peut conduire l’être humain à toutes les bassesses.

 

 

 

livre 2104153


 

Ursula Hegi. Brûlures d’enfance. Paris : Livre de Poche, 2014. 353 p. 7.10 €

 

 

 

Poursuivant le temps. 1937 : Bérénice, jeune actrice juive parisienne, a 18 ans lorsqu’elle est admise au sein de la prestigieuse Comédie Française. Née Capel, d’un père qui avait fait francisé son nom de famille Kapelouchnik en 1892, l’élève de Louis Jouvet prend le nom de Bérénice  de Liginières. Très vite remarquée pour son talent de tragédienne, elle foule les planches et les cœurs, malgré les rivalités et la montée du nazisme. Mais le bonheur est de courte durée : sous le coup des lois raciales promulguées en France, la Comédie doit exclure les juifs. Dénoncée, Bérénice doit se cacher de tous, vivre la mort de son père et découvrir, après l’arrestation de l’homme qu’elle aime, la clandestinité et la résistance.

 

 

De 1934 à 1944, date du départ de Bérénice dans un convoi à destination inconnue, nous suivrons l’évolution de cette femme, liée à celle de la Grande Histoire. Un beau récit, chargé et émouvant.

 

 

livre 2104152

 

 

 

 

Isabelle Stribbe. Bérénice 34-44. Paris : Le Livre de Poche, 2014. 360 p. 7.10 €

 

 

 

 

Eté 1944. Auschwitz. Primo Levi, déporté juif italien, rencontre Jean Samuel, étudiant en pharmacie français, juif également. Une amitié profonde se noue, rendue encore plus vitale du fait des conditions de survie des deux jeunes hommes. Jean Samuel deviendra Pikolo pour le futur auteur de « Si c’est un homme », qui le décrira dans son œuvre comme un personnage presque mythique, qui incarne à cet instant la dignité et la force. Au retour des camps, Jean Samuel se terrera dans le silence, incapable de décrire cette période de sa vie.

 

 

Mais il échangera pendant des années de multiples courriers avec son ami retrouvé. Courriers et échanges qu’il livre dans les pages de ce livre, après 60 ans de silence. On y découvre la description des marches de la mort, des horreurs perpétrées contre les déportés, mais également les incroyables ressources que l’Homme essaye de déployer pour résister à la barbarie. Jean Samuel résout des exercices de maths. Primo Levi traduit des vers de Dante… Ce témoignage fort atteste de l’amitié des deux déportés, jamais mises à défauts malgré la distance ou les difficultés financières, jusqu’au décès tragique de Primo Levi. Il livre les confidences de Pikolo et de l’écrivain, marqués à jamais par leur histoire commune.

 

 

 

livre 2104156

 

 

 

Jean Samuel. Il m’appelait Pikolo. Paris : Pocket, 20115. 213 p.

 

 

 

 

Après ces trois « romans » de différentes époques, nous arrivons à deux ouvrages traitant du fonctionnement nazi selon deux angles : les femmes au service d’Hitler et l’univers concentrationnaire.

 

 

Edité chez Tallandier, « Les furies de Hitler » revient sur la place des femmes dans le génocide de 39-45. Loin d’être de simples témoins, nombre de jeunes femmes endoctrinées par les discours nazis ont pris une part active dans les assassinats et les tortures. Très bien documenté, cet ouvrage ouvre une porte mal connue car ô combien troublante de ce pan de l’Histoire. Comment une mère peut-elle devenir tortionnaire et assassin – y a-t-il d’ailleurs un féminin de ce terme ? Comment une femme peut-elle encourager les soldats dans les exécutions de masse et se transformer en furie contre des êtres humains ? Il n’y a pas eu que les « souris grises » de SS, il y a eu des meurtrières. Au travers de divers témoignages recueillis, entre autres, au moment des procès d’après-guerre, l’auteure nous glace par ce récit sombre et tragique, mais néanmoins nécessaire pour comprendre l’Histoire.

 

 

Le second ouvrage consacré au régime concentrationnaire, paru chez Perrin, dresse un tableau très précis des règles régissant les camps de concentration. Au-delà des décisions arbitraires d’exécution, l’auteur démontre que le travail forcé et la vie quotidienne étaient soumis à l’application de règles précises, de règlements, arrêtés, circulaires conduisant à la répression ou à la mort. Les SS légitimaient ainsi leurs actes, obéissant à des directives supérieures visant à vider les détenus de leur humanité en toute « légalité ».  Comble d’ironie, certains documents précisent que toute violence infligée aux détenus sera suivie d’un traitement disciplinaire ». Au-delà de l’étude fouillée, cet ouvrage nous interroge sur la dérive possible, pour une réglementation, de produire une oppression efficace. A méditer.

 

 

 

livre 2104155

 

Wendy Lower. Les furies de Hitler. Paris : Tallandier, 2015. 350 p. 20.90 € / Nicolas Bertrand.

 

 

 

livre 2104154

 

 

L’enfer réglementé – Le régime de détention dans les camps de concentration. Paris : Perrin, 2015. 397 p. 23.90 €

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 






Le commentaires sont fermés.