ECLA : Chagotville une magnifique représentation (Saint-Vallier)
La mère en gueule au sommet de son art.
Des fantasmagories sont animées d’une voix off qui est celle de Léonce Chagot…
C’est la logorrhée paternaliste, l’hygiénisme, le catholicisme social, la quête compassionnelle de la bourgeoisie industrielle sont déployés en quelques minutes au travers d’un récit halluciné en canon
Un grand moment, du vrai théâtre, du grand théâtre. Les spectateurs (150 environ) découvrent peu à peu la naissance de l’homo Montcellienicus…
C’est en fait une naissance inaboutie. Le créateur, le démiurge, est du côté droit, Il est dans la fibre capitaliste de l’époque. On ne peut juger hier avec les yeux d’aujourd’hui.
Sauf que le peuple, l’armée des profondeurs des houillères, est lui du côté gauche du corps social.
Et c’est la confrontation de ces deux hémisphères d’un cerveau en cours de création qui fera vibrer la fibre montcellienne qui tissera l’ADN du Bassin minier.
Dans cette pièce, grâce au talent de Patrick Grégoire, le spectateur assiste à la naissance de la ville, il participe aux combats, aux grands mouvements de fond, partage les souffrances, rugit aux douleurs, exulte aux victoires.
On est au chevet des convulsions d’un 19ème siècle que l’industrialisation impacte avec une violence détruisant les philosophies, les rapports humains, créant les grandes migrations vers les villes, explosant les liens sociaux.
La Mère en Gueule c’est comme du papier de verre sur de la soie, on gratte jusqu’à la trame, on met à nu la fibre sociale, on sonde les cœurs et les reins.
Sans la fronde à la main, mais le verbe à la bouche, c’est le plus faible et donc du plus courageux qui remporte la mise face au plus fort.
Dans l’assistance certains ne sont pas à leur première représentation de la pièce, mais c’est comme un excellent champagne, un met gastronomique, l’appétence est là et du coup on y revient, on ne peut s’en passer.
L’ECLA sert ce samedi 25 mars au soir d’écrin à un diamant pur… Un vrai succès populaire.
Gilles Desnoix