La Mort aux trousses… du T.S.B
Transe-express, destination finale: « Tambours de la Muerte »
« Je trouve qu’il n’y a pas de ridicule à mourir dans la rue quand on ne le fait pas exprès. » Stendhal.
Depuis quelques temps, nous faisons fis des choses qui empoisonnent notre quotidien aux profit des joies que sont les animations du T.S.B. En voilà une bonne chose !
Pourtant, nous, justes mortels qu’un simple fil retient, avons invité La Grande Dame Aux Ciseaux à déambuler ce vendredi soir dans nos rues. Quelle idée casse-pipe!
Et dire que je viens d’apprendre à mon chien à faire le mort !
Certes, vous me direz que certains pays le font (inviter La Mort j’entends, pas dresser son chien…) depuis des temps immémoriaux sous couvert de diverses religion, alors pourquoi pas nous sous le joug des festivités?
Soit! Toutefois, il était légitime pour quelque quidam de nourrir un semblant de crainte quant à cette déambulation. Une question pouvait alors effleurer les esprits: Pouvons-nous rire et nous émerveiller devant une image qui réveille des peurs ancestrales enfouies dans l’inconscient collectif? Ou plus précisément, doit-on garder un œil torve sur ce genre de spectacle? La réponse ne se fit pas attendre: Envoyons ad patres tous les clichés! Accordons-nous un nouveau souffle de vie!
Dès le départ, Place du Capitole, la Compagnie Transe-express nous plonge immédiatement dans le feu de l’action, l’Ultime et Grand Voyage. Un claquement de doigts osseux suivit de roulements de tambours et toutes nos craintes lugubres disparaissent, ou plutôt, s’évanouissent. Pour la plupart, c’est un nouveau réveil, la résurrection de l’âme d’enfant endormie au plus profond de chacun.
La déambulation vers la mairie se ponctue de danses, de rires et de fumigènes. Tout comme nous, la Mort s’amuse!
C’est donc bien à « des fins » pacifiques qu’Elle et ses sbires rendent courtoise visite à nous autres, défunts en devenir venus en masse. Et c’est peu dire. Très difficilement, il me faut me frayer un chemin vers l’au-delà de cette foule pour réussir à prendre des clichés* de mon Sujet.
Quelle n’est pas ma surprise, au cours de ma progression titubante d’entendre des bribes de discussions telles que:
« – Tu connais Roger, le teinturier, et bien il s’est tué à la tâche… »
Ou bien encore:
« – Je suis mort de rire en pensant à tous ceux qui ont fait leur ménage à fond aujourd’hui de peur de mordre la poussière ce soir… »
Ne faisant aucun cas de ces paroles qui meurent dans les tonalités de la musique tonitruante et « mortuairement » festive (oui, pour cet article tenant du domaine du fantastique, je m’octroies le droit d’inventer des mots!), je maintiens difficilement à bout de bras mon appareil-photo pesant.
Ne trouvant pas le bon angle, je passe prestement la lourde arme à gauche où j’ai nettement plus de champ visuel de ce côté-là. (Tiens? C’est étrange…).
La troupe abuse alors avec fascination de leur thème dans un maelström visuel et sonore alternant le contemplatif et le subjectif.
Subjugué, obnubilé, hypnotisé, charmé… (à vous de choisir, pour ma part, je ne sais plus!), je suis la lente progression de la parade trépas à pas.
Dans le tohu-bohu ambiant, je croisai tantôt des adolescents juvéniles aux yeux pétillants s’envoyant frénétiquement des sms genre mdr (Mort De Rire…), tantôt le sourire d’un bébé face aux dents de La Mort (…), mais aussi des patriarches malicieux tirant goulument sur leur nouvelle pipe étincelante.
Tous émerveillés comme chacune des centaines d’âmes survivantes et témoins de cet événement magique.
Le point culminant du spectacle se dévoile sur le parking de la mairie: les démons, après avoir choisi une âme pure, en l’occurrence celle de Stephane, le font danser avec la Mort. Puis , lors d’un passage rituel, il doit diner en compagnie de cadavres, monter sur un poteau, se fait percuter, malmener et torturé… Quel bonheur pour les citoyens!
« Urne » fois n’est pas coutume (funèbre), ce fut au tour de La Faucheuse de disparaître dans les méandres ténébreuses emportant seulement avec Elle le souvenir d’innombrables yeux crépitants de bonheur et encore plus de sourires béats. Le tout trahissant une joie de vivre grandissante et communicative.
Dame Mort a réussit haut la main (squelettique) son pari d’amener un souffle de vie dans les rues en ce début de soirée…
La déambulation mortuaire achevée, je m’aperçus que malgré les flammes, aucune cendre ne recouvrait le sol. C’était en observant la foule se disséminer pour vaquer vers d’autres festivités le cœur en liesse, que je vis les seuls dépôts calcinés existants. Ils étaient tous dans les cendriers autour desquels, certaines personnes mortes de soif, partageaient un verre… de bière!
Laissant, bien entendu, tous les cadavres aux bons soins des serveurs.
Une question de vie ou de mort, se désaltérer reste vital… Tant que personne n’est ivre-mort…
Pour excuses (tacites): La « fin » justifie les moyens!
Mort alitée:
S’affranchir de la réalité et passer de l’autre coté du miroir: cela ne pouvait être qu’un moment singulier, une promesse tacite comme un lien intime entre la vie et la mort, entre les artistes et les spectateurs.
Cette expérience doit-elle nous interroger sur le sens de notre vie? Chacun a sa propre réponse.
Quoiqu’il en soit, profitons sans remords de ce qui nous est donné, jouissons le plus possible du temps qui nous est offert ici-bas car ressentir peur et peine n’est pas capital!
Vivre avec un « V » majuscule l’est bien plus!
En tous cas, votre serviteur, lui, en meure d’envie…
* Toute ressemblance avec des personnes vivantes ou mortes-vivantes n’est que pure coïncidence.
Texte et photographies: Sam Soursas









