Réactualisé ce mercredi 11 octobre à 20 h 01/ Assises : braquages avec armes en 2014 dans le bassin minier !
Le verdict est tombé !
Verdicts : André, 7ans de prison, Lucien 4 ans dont 2 ans avec sursis assortis d’un suivi mise à l’épreuve de 2 ans
Interdiction pour les 2 de détenir une arme pendant 5 ans
Le public pris par l’émotion reste debout après le départ de la Cour, comme pétrifié.
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Doinique Fenogli, avocat général, a requis 9 ans de prison contre André, auteur principal des 5 cambriolages à main armée (d’un pied de biche, pour l’essentiel) dans le bassin minier à l’automne 2014, et 6 ans contre Lucien, son complice.
L’avocat général a donc décidé de faire la part des choses, ne mettant pas les deux tout à fait dans le même sac, mais maintient que « sans complice, ces braquages n’étaient pas possibles ». Dont acte.
Un argument saillant au cours de ses réquisitions : l’idée de braquer leur est venu d’un article dans la presse locale relatant un fait divers. Il faut que les sanctions soient suffisamment dissuasives pour que d’autres errants, jeunes ou moins jeunes, n’aient pas à leur tour l’idée d’y aller.
Le courage et le temps (pour devenir un homme responsable)
Les avocats de la défense, Maître Diry pour Lucien, et Maître Vermorel pour André, alimentent l’eau du moulin qui mixe en France drogue et délinquance. Maître Vermorel fera « le procès de l’héroïne », et par-dessus tout, de ses trafiquants. Somme toute, sans eux, et « ce supermarché à ciel ouvert », comme le disait au premier jour du procès l’un des jeunes hommes, qui tourne 24 h/24 au pied de certaines tours au Creusot ou à Torcy, il aurait fallu trouver d’autres dérivatifs à leurs difficultés personnelles.
Parmi elles, « l’ennui », plaide Benoît Diry : son client vivait à Sanvignes chez ses grands-parents. Le jeune homme est seul à son procès : personne pour lui dans la salle, pas de soutien, or « il faut du courage pour aborder la vie » continue l’avocat, et « il en a manqué à l’abord de sa vie d’adulte », « il a fini comme un jeune découragé ». La drogue a détruit ce qui aurait pu servir de socle, la drogue emporte tout : la volonté, les valeurs, la morale, tout.
Mais Lucien « a eu une détention exemplaire, il n’en a pas perdu un seul jour : il s’est sevré, il a passé 3 diplômes, il a réussi son code, etc. » Le risque, expose l’avocat, c’est qu’un jour vienne où il commencerait à perdre son temps en prison, que le sens qu’il y met se retourne en une sorte de vide, et l’on sait ce qu’il advient alors.
« Il a appris le courage », il a appris à construire, il en témoigne avant que les jurés ne se retirent pour délibérer : « Je sais qu’on a commis des crimes, et je le regrette, je fais un gros travail sur moi-même, et tout mon possible pour me réinsérer ». Le courage, de quelque nature qu’il soit, est inaliénable : on ne le forge et le trouve qu’en soi-même.
« Les trafiquants vendent la mort » enfonce Maître Vermorel, et si André a patiné, essayé de s’en sortir, rechuté, ré-essayé, c’est qu’il faut du temps. L’avocat s’en réfère à Chronos, le maître du temps, « le temps c’est le maître » …quand on en fait quelque chose.
André, en prison, est égal à ce qu’il montre au procès : peu loquace, renfermé, « mais il se tient à l’écart des gangs », et « il donne des coups de main dès qu’il le peut », il est serviable, son père le rappelait hier. Claude Vermorel affirme que le jeune homme doit reprendre « le temps des soins », d’abord. Il pense que son client a des épisodes dépressifs, et regrette que l’on manque de structures, de lieux fermés dédiés aux soins des toxicomanies, car cette délinquance-là, qui mènes les deux copains en Cour d’Assises, pas moins, reste liée à la drogue. Il sollicite les jurés sur ces questions, « on ne donne pas 9 ans de prison, comme on donne une réprimande ».
L’avocat conclut en replaçant, comme son confrère l’avait fait, les enjeux du verdict du côté de la vie, il cite Goethe et son fameux : « Meurs et deviens ! », en appelle à la naissance possible du jeune homme à une vie consolidée, et André dira : « Je m’excuse auprès des victimes et des miens auxquels j’ai fait du mal. Je veux juste me soigner et ressortir plus fort. »
Verdicts en fin d’après-midi.
Mardi 10 octobre 2017 :
Le procès d’Assises des deux braqueurs à Sanvignes, Saint-Vallier et Blanzy ne semble présenter qu’une difficulté : comprendre « réellement » ce qui a présidé aux passages à l’acte des deux héroïnomanes de l’époque. André, 21 ans au moment des faits, comme Lucien, 27 ans en 2014, ont tout reconnu, mais la présidente reste titillée par leurs préparatifs, et intriguée par la récidive d’André : il a conseillé « une connaissance » qui elle aussi avait besoin d’un peu de fraîche, il lui a fourni une matraque télescopique et a repéré les lieux. Il a été jugé pour cela et condamné 2 ans de prison, cette année.
« Est-ce que vous vous considérez comme un gamin sans cerveau, monsieur ?
– Oui oui », expédie le jeune homme d’un ton plat, puis il écarte le micro et se penche vers Maître Vermorel, son avocat. André a une attitude plutôt rétive, presque frondeur dans ses réponses aux multiples questions, mais l’huissier introduit son père :
« Quelques jours avant les faits, j’ai arrêté de donner de l’argent à mon fils, car j’avais compris que les sommes demandées ne servaient pas à faire le plein et acheter de la nourriture. Le 19 octobre, 2 jours avant le premier braquage, je l’ai emmené à l’hôpital de Montceau pour essayer de le faire interner d’office. On est ressortis avec une ordonnance contre le stress. On a tiré des sonnettes d’alarme, on a essayé, mais y a rien derrière. Je m’explique peut-être mal, excusez-moi mais je suis un ancien mineur. »
Le père reprend : « Comme ses frères, c’est quelqu’un de très courageux, toujours prêt à rendre service. »
De la reconnaissance et de l’affection, c’est trop : le jeune homme ne peut plus tenir sa position défensive, il devient très rouge, les émotions prennent le dessus, il se met à pleurer.
La présidente Caroline Podevin évoque le frère aîné, « très malade », et puis cette toxicomanie à l’héroïne qui commence lorsqu’André est quitté par sa compagne.
« Et puis la maladie de ma mère, qui a duré des années, et André était son chouchou. »
On demande au père s’il va visiter son fils en prison : « Ben, il reste notre enfant. Quand il sortira, on sera là pour lui. »
Le garçonnet choyé par cette grand-mère se tasse encore, il est cette fois-ci dans un état nerveux limite, agité de micro spasmes, de ceux qui peuvent mener à l’hyperventilation, rien ne va plus. Cet état va durer presque 2 heures, parce que c’est pas fini, sa mère s’avance à la barre.
L’image de la mère-courage a peut-être fait long feu, n’empêche que cette femme, caissière, a mis 5 garçons au monde, a perdu le premier encore nourrisson, et accompagne l’aîné diagnostiqué schizophrène en 2005, elle est là pour le 3ème de la fratrie :
« Quand il arrive des choses comme ça, on se remet beaucoup en question, on se demande ce qu’on a loupé. »
Elle raconte comment elle a réalisé que son fils avait perdu 28 kg, mais n’a pas fait le lien avec la toxicomanie, et la présidente va pousser ses questions, « comment peut-on ne pas voir ? ». Peut-être faut-il être informé, averti des signes, pour les identifier correctement ? La maman n’est pas spécialiste : « On sent des choses, mais on ne comprend pas. »
Elle poursuit ce que son ex-mari avait commencé : « Je trouve que le suivi n’est pas suffisant », elle dit là des choses qui en dehors des salles d’audience ne sont un mystère pour personne, « on manque de moyens, on n’arrête pas de me le dire ». Lorsqu’André rechute, elle est « en colère contre lui et contre le système médical : on n’est pas aidé dans ces cas-là, je pense que si on avait été aidé, on n’en serait pas là aujourd’hui. » Et cette femme, mise en demeure de justifier une cécité plutôt compréhensible devant des réalités qu’elle ne connaissait pas, entend : « En même temps, ça appartient à votre fils. » On reste perdu devant cet écheveau de responsabilités interrogées dans tous les sens, mais la mère, avec un certain bon sens, porte l’estocade : « Sans l’héroïne, il n’aurait jamais fait ça. Ils sont où ceux qui la vendent ? Ils sont chez eux, à détruire des vies. Se sortir de l’héroïne, ce n’est pas simple. »
En écho reviennent les paroles des deux accusés : « C’est pas compliqué au Creusot : vous allez au pied d’une tour, et on vous vend ce que vous voulez. »
Dernière question de la présidente : « Qu’est-ce qu’il faut faire pour que ça s’arrête ? »
Et les parents de répondre d’une seule voix : « Qu’il se fasse soigner ! »
Verdicts ce mercredi dans la soirée.
Florence Saint-Arroman
Lundi 11 octobre 2017 :
Il avait un sac Leclerc à chaque fois : c’est un des éléments qui ont conduit les enquêteurs à penser que le même individu avait braqué, entre le 21 octobre et le 24 novembre 2014, le bureau de tabac Les Georgets à 2 reprises ainsi que le Maximarché de Sanvignes-les-Mines, le Proximarché de Blanzy, et la station-service Relais du Salon à Saint-Vallier. 5 braquages avec armes : 5 braquages avec armes : pied de biche, couteau, fausse arme de poing. L’auteur avait un complice : les deux hommes, nés en 1990 et en 1986 ont été arrêtés rapidement.
On va les appeler André, 27 ans, et Lucien, 31 ans. Ils ont fait de la détention provisoire, puis furent placés sous contrôle judiciaire, ils donc auraient pu comparaître libres, mais leur vie pénale les a renvoyés en prison, pour autre(s) chose(s), une escorte les encadre.
Lorsqu’ils ont braqué la station-service de Saint-Vallier, le 24 novembre 2014, les deux jeunes hommes ont changé de véhicule, ils ont élégamment emprunté celui de la mère d’André : un témoin relève la plaque d’immatriculation. Le commissariat de Montceau connaît déjà André « pour des faits de stupéfiants ». Ils surveillent le domicile, l’arrêtent : dans sa chaussette, une bonbonne d’héroïne.
« C’est moi qui suis entré dans les commerces, je m’excuse. Nous étions en phase de toxicomanie, sous l’emprise de l’héroïne. On n’a pas pensé au mal qu’on pouvait faire aux gens, c’est en détention qu’on en a pris conscience. » Le jeune homme répètera à l’envi qu’ils n’ont « pas pensé », « pas préparé », « pas réfléchi ». La présidente Caroline Podevin conviendra que tout cela n’était « pas bien pro », sauf que les accusés encourent 20 ans de réclusion criminelle, alors la Cour va examiner de très près le contexte et les déroulements des braquages successifs. Dura lex, sed lex.
« L’idée nous est venue en lisant un article de presse sur Montceau, un braquage dans un magasin, et comme on était en manque, on a essayé de faire pareil. »
État de manque… André sniffait à l’époque entre 4 et 5 grammes d’héroïne par jour, il lui fallait à la louche 100 euros par jour.
« C’est comment, la vie d’un toxico en manque ? interroge la présidente.
– On pense qu’à trouver de l’argent pour payer nos consommations de drogue.
– On vole ses proches ?
– Non, parce que c’est des proches, on invente des prétextes pour qu’ils nous passent du liquide. On achetait la drogue au Creusot, jamais aux mêmes personnes.
– Ah bon ? C’est pas grand, pourtant, le Creusot ?
– C’est pas compliqué au Creusot : vous allez au pied d’une tour et on vous vend ce que vous voulez. »
André et Lucien lisent donc la presse locale, se disent qu’un braquage est une idée, passent à l’acte dès le lendemain, « sans réfléchir » mais en prévoyant quand même des fringues, un masque, et un pied de biche. La présidente se fait parfois mordante, pour que les accusés atterrissent et prennent la mesure de ce qu’ils ont élaboré, des précautions prises (des gants), et de la peur suscitée à dessein pour obtenir les différentes caisses.
D’après les victimes du premier vol, les garçons ont pu se partager 800 à 900 euros, immédiatement, ils filent à Torcy, au pied des grandes tour de la résidence du Lac (tours qui vont être détruites, ndla), ils achètent ce dont ils sont à ce moment-là impérieusement besoin, et tout l’argent file, tout a été consommé aussi vite qu’une allumette se consume. Le manque profile déjà sa face hideuse, alors : « Il fallait refaire un autre braquage. »
Florence Saint-Arroman
Les prénoms ont été changés !
2 commentaires sur “Réactualisé ce mercredi 11 octobre à 20 h 01/ Assises : braquages avec armes en 2014 dans le bassin minier !”
en lisant cet article , il semblerait qu’il n’y a que l’Etat et ses subalternes qui ne seraient pas au courant des trafics de drogue ,
qui tueraient beaucoup plus que la route à moyen et long terme, un véritable fléau national.
a qui profiterait ce trafic .
Aujourd’hui tout le monde sait qu’il y a les vendeurs de drogue ces gens là ne sont jamais arrétés et c’est bien là la source des problèmes. Il faut prendre les problèmes à la source . Pas de trafiquants pas d’ acheteurs, où sont ces vendeurs ils continuent de vivre roulant dans de belles voitures achetées avec l’argent de leurs ventes plongeant des familles dans la détresse.