Tribunal : Comparution immédiate Montceau
Maintien en prison pour une dette de 20 €..........
« Vous avez conscience que si vous êtes là, c’est à cause des stupéfiants ? demande la présidente aux deux jeunes prévenus. – Oui mais c’est quand on traîne dehors, c’est ça qui nous fait partir là-dedans. »
Le problème pour ces deux-là comme pour tant d’autres c’est que « là-dedans » on trouve de la drogue, mais aussi des dettes ou des créances, et au fil du temps, des vols, des faits de violences, des armes. A peine 18 ans pour l’un, 20 ans pour l’autre, et ils encourent 7 ans d’incarcération.
« C’est pourri, la prison »
Arrêtés le 2 novembre au matin, ils sont en prison depuis le 3 novembre, nous sommes le 7. « C’est la misère, dit D., on peut voir personne. La prison, non, je ne veux pas. » G., le jeune majeur, donne aussi son point de vue : « T’es enfermé, t’as pas beaucoup de sorties, c’est pourri. Je conseille à personne, la prison. » C’est pourri, mais G. semble déjà blasé, il est dans le circuit judiciaire depuis longtemps, de mesures d’assistances éducatives en sanctions diverses, du reste condamné pour stups par le tribunal pour les enfants quelques jours avant les faits, rien ne l’a empêché de continuer son cirque juste après. Le présidente Therme en est amenée à faire de l’éducation, sur la façon dont la société se structure avec des lois, et avec des « punitions » qui n’ont plus rien à voir avec celles que des parents peuvent dispenser.
Menaces, vols et violences à Montceau
Ils sont jugés en comparution immédiate pour 2 séries de faits que le parquet a décidé de joindre, vu le comportement des deux garçons et l’avalanche de poursuites.
Le 1er novembre, Kevin (prénom modifié) est terrifié : voilà des semaines que D. le harcèle, squatte chez lui à Montceau-les-Mines, et l’enquiquine lorsqu’il ne lui ouvre pas sa porte. Il y aurait une dette de 20 euros entre eux. Kevin lui a acheté une DS Nintendo pour une de ses filles, et n’a pas tout réglé. D. a les nerfs, ne se sent plus, et lui a annoncé qu’il viendrait « ce soir ». Alors Kevin alerte son propre père qui commence par véhiculer son fils sur ses trajets de boulot, puis passe la soirée chez lui, avec quelques amis. Et les jeunes se pointent, ils sont 3, mais l’un s’enfuira très vite. Altercation, coup de poing ou coups de poing, les versions divergent, n’empêche que la police les avait à l’œil et voulait les entendre pour des faits du 30 octobre à Blanzy, mais G. n’avait pas répondu à la convocation. Alors ce coup-ci les policiers les cueillent à l’heure du réveil le lendemain matin, et le parquet, qui « au bout d’un moment, en a un peu marre de ces deux-là » les fait déférer.
Des faits similaires le 30 octobre à Blanzy
Le 30 octobre, c’est également pour « une dette d’il y a longtemps », de 20 euros également, qu’ils se pointent chez un jeune couple. La maman a le bébé dans les bras, les autres petits sont dans la pièce à côté, ça n’empêchera pas l’échauffourée, ni le vol, ni la menace avec un couteau. Toutes les victimes sont à l’audience, accompagnées d’amis et de parents.
Le jeune homme victime de Montceau porte un bracelet électronique, une peine « d’avant », quand il touchait au stups, et il incarne bien la difficulté à sortir de ces relations poisseuses et mafieuses dans leurs procédés, quand on se trouve « là-dedans ». Heureusement qu’il a pu compter sur son père, c’est peut-être ce qui fait la différence : G. n’a aucune relation avec son père, sa mère n’est pas non plus dans la salle, elle vient d’avoir un bébé et voudrait partir rejoindre le père en Guadeloupe, elle a demandé à la justice de rendre son fils autonome rapidement (souvent placé, il a une protection « jeune majeur » maintenant), pour qu’elle puisse partir. L’aberration de cette situation est criante, mais G. est majeur désormais « votre destin vous appartient, monsieur », lui dit la présidente. D., lui, bénéficie du soutien de sa mère et de ses sœurs dans la salle, mais son père n’est pas là, son métier le met sur les routes tout le temps.
« C’est tellement bête, plaide l’avocat, cet effet de bande »
Caroline Mollier, substitut du procureur, dit qu’elle a dû accepter que Kevin, porteur du bracelet électronique, dorme ailleurs une nuit, avant de déménager dans l’urgence, histoire de donner la mesure de la panique, la mesure de la gravité des faits. Elle requiert 30 mois de prison dont 12 mois assortis d’un sursis mis à l’épreuve et leur maintien en détention.
« C’est la jeunesse à Montceau-les-Mines en 2017, lance maître Sarikan pour la défense des garçons. Une jeunesse désœuvrée, qui s’est retrouvée en bande, dans une période de vacances ou sans travail, soit deux circonstances exceptionnelles. » L’argument ne mord pas : D. et G. sont connus de la justice. « C’est tellement bête, plaide l’avocat, cet effet de bande. C’est la jeunesse actuelle qui veut tout, tout de suite. Les stupéfiants et l’addiction aux jeux de D. les ont amenés à des gestes impardonnables mais ce ne sont pas des caïds, ils volent des jeux, des consoles, des manettes. S’ils étaient d’un milieu social aisé, ils ne seraient pas là. La prison ? Il faut leur laisser une chance avant le couperet final. »
Le tribunal condamne les deux prévenus à 24 mois de prison dont 12 mois assortis d’un sursis mis à l’épreuve pendant 2 ans, avec obligations de soins (psychologiques, et addictions aux stups, et aux jeux pour D.), d’indemniser les victimes, interdiction de contact entre eux et avec les victimes.
« Le sursis mis à l’épreuve, c’est un contrat : soit on le respecte, soit on ne le respecte pas, et on va en prison pour 12 mois supplémentaires. »
Maintien en détention. 1 an en prison, la peine commence maintenant, pour des dettes de 20 euros et des procédés de petits caïds.
FSA
Les deux garçons devront solidairement indemniser les 5 victimes pour un montant total de 3600 €.