Tribunal : conduite contestée mais pas d’avocat Montceau
Au final il est condamné à 30 jours-amende à 10 euros
« Il vous est reproché, monsieur, d’avoir conduit le 21 octobre 2018, alors que votre permis a été annulé par une décision de… » Le prévenu coupe la parole au président : « Je conteste ! A 100 % ! » A l’audience correctionnelle à juge unique de ce lundi 2 décembre, R. X., 47 ans, habitant de Montceau-les-Mines, répond à une convocation devant le tribunal mais il a décidé de se défendre seul et ce n’est pas une bonne idée, si on se fie au déroulé de l’audience.
Le prévenu s’exprime sans les précautions d’usage devant un tribunal
Son permis fut annulé judiciairement en 2010, suite à sa 3ème condamnation pour conduite sans permis (permis suspendu en 94, permis annulé en 98). « C’était pas moi ! C’était Y et je me suis fait justice moi-même. » On a affaire à un homme vif et spontané, qui répète trois fois cette phrase au lieu de s’abstenir. Cela étant, il est si peu calculateur qu’on peut le croire sincère. Il n’a jamais retrouvé son permis, pourquoi ? « On ne me donne pas mon papier rose ! Acte 141. Depuis 2011, j’ai fait beaucoup de demandes. »
On le voit assis côté conducteur dans une Golf qui se déplace
Le 21 octobre dans la nuit, sa voisine appelle la police : ce monsieur n’a cessé de faire du tapage dans la cage d’escalier, de tambouriner à la porte (la sienne). Ce monsieur perturbe. Mais il repart avant l’arrivée de la police. Un peu plus tard vers le matin, cette patrouille ou une autre, on ne sait pas, repère une Golf, rue du Chemin de fer, qui roule « à faible allure ». Son conducteur sort rapidement, « il titube, sent l’alcool ». Il refuse le test d’alcoolémie, les policiers vérifient son permis de conduire. Bonne pêche pour eux, le monsieur n’en a point de valide.
Il avait perdu les clés de chez lui…
Le président Cano expose les faits mais le prévenu trépigne : « Et pourquoi je frappais la porte ? Vous ne vous posez pas la question ? » Le juge le recadre. On comprendra a posteriori que c’est pour ce monsieur la clé de tout. Il explique qu’il avait acheté cette voiture pour sa copine, pour qu’elle aille travailler. La Golf avait un problème de batterie et de direction : il bricolait sur la voiture depuis midi, il a changé la batterie et réglé le reste, puis il a passé la soirée avec des amis, ils ont bu un peu, il rentre chez lui assez tard. Il arrive devant sa porte : il n’avait pas ses clés. « J’ai tapé la porte parce que j’avais pas mes clés, j’étais énervé. Je me suis demandé comment faire, j’ai passé des heures comme ça, et puis j’ai pensé à la voiture ! Et je suis allé regarder si je les trouvais. » Il avait jeté son téléphone, de rage impuissante, dans les escaliers.
« Les policiers m’ont d’abord dit que je l’avais volée ! »
D’après lui, il cherche d’abord dans l’habitacle, puis il veut regarder dessous, il enlève le frein à main, et la laisse glisser en roue libre sur quelques mètres. « Les policiers m’ont d’abord dit que je l’avais volée ! » Pourquoi avoir refusé le test-alcool ? « Je m’y soumets si je suis hors la loi, mais là, j’étais pas hors la loi. » Le vice-procureur entre dans la danse, confronte le prévenu à son casier judiciaire. Le président relève que « le problème c’est que les horaires ne correspondent pas », puis précise que l’intervention de la police dans l’immeuble suite à l’appel de la voisine, « n’est pas horodatée ». La police dit qu’elle a contrôlé monsieur à 7h35 le matin. Ce n’est pas exact, renvoie le prévenu, il était entre 5 et 6 heures. Ce sont les auditions qui ont commencé après 7 heures.
Le procureur requiert 3 mois avec sursis
« Les choses ne sont pas aussi claires dans le dossier », constate le président. Le vice-procureur n’en démord pas : « il y a tellement d’incohérences. Il invente d’avoir eu à chercher ses clés sous le véhicule. Il pouvait avoir une lampe, soit avec son téléphone (que les policiers ont trouvé dans la cage d’escalier, en fait), soit dans la voiture. Les services de police constatent qu’il roulait à faible allure. Il est dans l’invraisemblance. » Il requiert 3 mois de prison avec sursis. Le prévenu n’a pas d’avocat, il a la parole : « Tout ce que je vous dis, c’est la vérité. Moi je dis la vérité, j’ai cherché les clés, c’est tout. Si je les avais eues avec moi, il n’y aurait eu aucun problème et je ne serais pas là. »
Coupable, jours-amende
Le tribunal le déclare coupable et le condamne à 30 jours-amende à 10 euros, soit une amende de 300 euros à payer dans les 30 jours. Toute tranche de 10 euros impayée peut être convertie en jour de prison.
A sa sortie de la salle, un homme qui se trouvait dans la salle conseille au fraîchement condamné passablement dégoûté de l’être de faire appel. « Je ne sais pas, je ne voulais pas prendre d’avocat, j’aurais dû. J’ai pas bien parlé, j’ai pas su dire. Tout le matin, quand j’attendais je me disais faut que tu parles bien ! Et puis voilà, j’ai pas su faire. » S’il ne fait pas appel, la condamnation sera définitive, ça sera la 4ème et il aura beau jeu de dire « j’avais rien fait (d’interdit) », sa parole sera encore moins crédible. Accepter une condamnation, c’est aussi reconnaître sa culpabilité.
Florence Saint-Arroman