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lundi 18 mai 2020 à 15:10

Gilet jaune du Magny devant la justice

Amende avec sursis mais....



 



 

 

Sur les marches du palais un petit groupe de soutien des gilets jaunes de Montceau-les-Mines. Dans la salle désormais adaptée aux nouvelles règles de vie collective en vigueur, on va juger un retraité, un ancien transporteur routier âgé de 71 ans au casier vierge, pour avoir, le 9 février 2019, soit il y a 15 mois, insulté et menacé une policière.

Les faits et leur contexte

L’homme réputé dévoué et calme a pris un coup de sang lorsqu’il a vu un de ses copains se faire plaquer au sol. Brutalement, forcément. Le plaquage n’est pas une manœuvre ouatée. Il faut dire que ce jour-là l’ambiance était un peu chaude, sur le parking du magasin Leclerc, et les policiers veillaient au grain, veillaient devant eux, derrière eux et sur les côtés. Bref, au moment du plaquage ils sont une vingtaine de manifestants à se masser autour de la scène, et une policière use de sa gazeuse pour disperser tout le monde, avec succès d’ailleurs. Mais le prévenu en a gros et vient lui fourrer un index sous le nez, « ça ne va pas se passer comme ça, on va se retrouver ».

Divergences de vues et de contenu

A partir de là, les versions divergent. Selon la policière et deux de ses collègues, le prévenu aurait ajouté « connasse, salope, on sait tous où sont tes enfants ». Droit face au président Dufour, l’homme assure « sur la tête de ses petits-enfants » qu’au grand jamais il n’a dit une horreur pareille. Le président, qui en a vu d’autres, préfère qu’on laisse les petits enfants en dehors de tout ça, et travaille un peu le prévenu avec des questions pas évidentes à traiter en temps réel, quand on est jugé pour la première fois de sa vie, et qu’on estime que la plaignante en a rajouté trois louches pour faire bon poids.

« Ça fait 15 mois que ma vie est pourrie, 15 mois ! »

« Monsieur vous reconnaissez avoir pointé votre index et dit ‘on se retrouvera’. Pourquoi vous lui dites ça ? – On venait d’être gazé ! On était dans un état ! – Vous avez été gazé parce que vous empêchiez une interpellation. Comment vous expliquez que deux autres policiers témoignent ? – Je vois qu’il y a peut-être une part de solidarité entre eux, de soutien. Moi je vous dis, j’y mets mes deux mains à couper. » L’émotion subitement est forte, et le prévenu termine d’une voix qui suffoque, « ça fait 15 mois que ma vie est pourrie, 15 mois ! »

« Monsieur a eu une vie honorable »

« Je me méfie, d’expérience, énormément de l’effet de groupe, dit le président. Je sais qu’il peut être catastrophique. On peut alors dire et faire des choses, et ne pas se reconnaître, après. » C’est au tour de vice-procureur de parler : « Je veux bien admettre que ses paroles ont dépassé sa pensée. Il faut tourner la page. Monsieur a eu une vie honorable, un parcours honorable. Dans un moment d’égarement, il tient des propos qui sont des menaces. Le fait délictuel existe. » Charles Prost requiert 500 euros d’amende.

« C’est une procédure à prendre avec des pincettes »

Maître Bibard intervient pour la victime, il plaide en gardant son masque. Il expose que cette femme a déménagé suite à cet incident, « on a pris toutes les précautions possibles à Montceau ». Il demande pour elle 1000 euros d’indemnités. Maître Gaunet trouve au contraire que la police de Montceau n’a pas brillé par excès de précautions pendant cette période-là, il rappelle que sous le commandement de l’ancien commissaire, les affaires « montées en épingle » se sont multipliées. « C’est une procédure à prendre avec des pincettes. » Quant à la policière plaignante, « a-t-elle pu croire une seconde que ce monsieur, ce grand-père, allait s’en prendre à ses enfants à elle ? Je ne le pense pas. »

Amende avec sursis

Le tribunal déclare le prévenu coupable de ce qu’on lui reproche, et le condamne à une amende de 500 euros avec sursis. Il devra payer à la policière 500 euros d’indemnités, 200 euros pour ses frais d’avocat, ainsi que les frais de procédure.

L’ancien routier, époux et père et grand-père, quitte la salle, secoué. « A 71 ans, passer au confessionnal, c’est dur. »

 

Florence Saint-Arroman

 

 

 



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2 commentaires sur “Gilet jaune du Magny devant la justice”

  1. Gerard13 dit :

    C’est vrai qu’il y avait une super urgence à monopoliser un president , un vice procureur , un avocat pour juger une telle affaire en période de guerre ( dixit le président de la république ) . Je croyais qu’on voulait un monde d’après ….La police ne se grandit pas non plus . S’ils paniquent comme ça devant un papy , je comprends que dans les banlieues des grandes villes il y ait des cartiers ou iles policiers ne vont pas ….

  2. 27emebca dit :

    Et bien la justice est vraiment cool dans ce pays! Ou elle a peur des gilets jaunes…
    Heureusement que les flics non pas eu d amendes!