L’accident s’est produit à Saint-Vallier mais l’auteur demeure à Sanvignes…

 

Le prévenu est volubile et s’exprime bien. Il fut représentant de commerce. Les kilomètres, les clients, les repas pro, le burn-out, le décès de son père, ses soucis de santé, il est retourné vivre chez sa mère, il a un taux d’invalidité de 80 %, bref, il souffre de bipolarité et de dépression et d’alcoolisme. Il a perdu son permis de conduire, à cause de ça, mais il avait racheté une voiture et le 1er octobre il part avec, pour aller visiter un ami à l’hôpital, dit-il. Il prend un raccourci, sur la commune de Saint-Vallier, et reconnaît après coup que « quand on voit cette rue, c’est sûr que deux voitures, ça passait pas ».

 

Pas de blessés mais un casier judiciaire

 

Collision. Pas de blessés. « Comportement virulent à l’égard des policiers », relève la présidente Verger en exposant les faits, à l’audience de comparution immédiate de ce lundi 6 octobre. Le prévenu a 44 ans et son casier explose, lui, son rapport à l’alcool, « et à la route », puisqu’il persiste à conduire alors qu’il ne devrait plus. Dans quelle mesure est-il possible de vivre, et non de vivoter, sans moyen de locomotion lorsqu’on vit en zone rurale ou semi-rurale ? Le prévenu n’en dit rien, il dit : « Je me suis octroyé un passe-droit et j’en suis sincèrement désolé pour la personne accidentée, et je vais tout faire pour rétablir ce méfait. » La victime ne se constitue pas partie civile.

 

L’alcool en CI : c’est habituel, mais on ne s’habitue pas

 

L’immense association des Alcooliques Anonymes présente ainsi le sujet : « L’alcoolisme est une maladie caractérisée par l’obsession de l’alcool et la perte du contrôle de sa consommation. Comme toute addiction, elle nuit à la santé, à la capacité de travail et au comportement relationnel et social. L’alcoolisme est une maladie émotionnelle et psychologique autant que physique. » Hier, à l’audience de comparutions immédiates, les 5 personnes jugées avaient maille à partir avec l’alcool. C’est habituel, mais on ne s’habitue pas.

 

Charles Prost, vice-procureur, pose clairement le cadre juridique et judiciaire. D’un ton sépulcral il énonce que l’alcoolisme est une maladie « presque incurable », « c’est une réalité », « mais on n’est pas obligé de conduire ». Il requiert 1 an de prison ferme, avec maintien en détention.

 

Il exprime toute la bonne volonté du monde, mais le tribunal le ramène à ce qu’il a fait

 

Maître Diry plaide pour une atténuation de la peine, suggère que l’alternance de phases maniaques, puis dépressives, fausse l’abord des situations. Son client a déjà été 11 fois condamné, les récidives de CEA, les suspensions de permis, puis son annulation, font pelote. Le prévenu parle de « crever l’abcès », il pense qu’il renferme un panel important de difficultés à traiter. Il exprime toute la bonne volonté du monde, mais le tribunal le ramène à ce qu’il a fait. Il a acheté pour 200 euros une voiture qu’il ne pouvait pas assurer faute de permis de conduire, et il l’a démarrée, il a pris la route, il a créé un accident. Voilà ce qu’il a fait. Ce n’est plus une question de souffrir de ceci ou de cela, c’est surtout faire fi des ceci et des cela, et des lois, ajouterait le procureur.

 

1 an ferme, incarcération, puis sursis probatoire renforcé

 

Pour relancer une activité professionnelle et mettre à profit l’exploitation de sa mère, il monte un élevage, c’est d’ailleurs ce qui l’a empêché, dit-il, de préparer le code auquel il s’était inscrit*, et voilà qu’il va rester en prison.

 

Le tribunal le condamne à 18 mois de prison, dont 6 mois sont assortis d’un sursis probatoire renforcé pendant 2 ans (obligations de soins en addicto et psycho), interdiction de passer son permis pendant 1 an, 150 euros d’amende. Maintien en détention pour la partie ferme.

 

Florence Saint-Arroman

 

*Le problème pour lui c’est de ne plus avoir de permis de conduire, le problème pour les autorités publiques et judiciaires c’est qu’il conduit en ayant bu. Le fait qu’il n’ait pas de permis est une infraction supplémentaire, mais ça n’est pas le problème principal.

 

https://www.alcooliques-anonymes.fr/apercu-sur-aa-association-alcooliques-anonymes/