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vendredi 30 octobre 2020 à 06:31

Faits divers : jugé pour des violences habituelles… Triste « histoire d’une différence de culture… »

7 mois de prison ferme, 2 ans de suivi et de probation



 



Il avait été placé en garde à vue mardi, incarcéré jeudi et a été jugé hier… Il s’agit du jeune homme de 28 ans qui frappait sa compagne de 25 ans à Montceau… Triste « histoire d’une différence de culture… »

 

 

Une voisine met fin à des violences conjugales

 

La jeune femme abaisse son masque, l’on voit les hématomes, le coquard sous l’œil gauche, le nez enflé, fracturé. Son époux est jugé en comparution immédiate ce jeudi 29 octobre pour des violences habituelles et aussi pour la dernière scène, il y a trois jours.

 

Maître Marceau va le défendre, cet homme de nationalité afghane, l’avocat dit toutefois que le dossier est « implacable ».

 

Cette jeune femme est « isolée sur le sol national »

La victime est présente avec leur enfant, un petit né en 2019, dont une femme qui travaille à France Victimes s’occupera pendant l’audience (il est arrivé à 14 h et repartira à 20 h, épuisé). La victime dit d’emblée qu’elle est venue parce qu’elle veut « lui laisser une chance », et qu’elle espère qu’après le jugement, il se tiendra correctement. Cette jeune femme est « isolée sur le sol national », comme le souligne le vice-procureur, Charles Prost. Sa mère vit en Turquie, et elle, à Montceau-les-Mines. Le petit est né à Annecy. L’enquête établit qu’elle y avait trouvé refuge, une fois, dans un foyer d’accueil d’urgence, car son mari a commencé à être violent pendant sa grossesse. Voilà pourquoi la prévention court de janvier 2019 à octobre 2020, c’est énorme.

 

« On lui a appris que les hommes ont des droits, et les femmes, des devoirs »

Lui, il est né en 92, dans une province au nord de son pays, pas loin du Turkménistan. Il est illettré dit l’enquête sociale, mais il a tout de suite trouvé du travail sur des chantiers, avec un contrat. Il a suivi 50 heures de cours de français langue étrangère, il comprend un peu, parle un peu, mais pas suffisamment pour prendre la parole devant un tribunal. Le tribunal est présidé par une femme. Que cela peut-il signifier pour lui qui « a été éduqué, plaide maître Marceau, dans un pays où les femmes sont attaquées à l’acide, un pays où l’on compte le plus grand nombre de meurtres de femmes, et de femmes policières ». « On lui a appris que les hommes ont des droits, et les femmes, des devoirs. »

 

Elle peut lui pardonner, dit-elle, si toutefois il cesse de la frapper et de l’insulter

La jeune femme n’a pas posé plainte et ne demande pas de réparation. Quand elle parle, dans sa langue, il joint les mains en prière ou en remerciement. Elle peut lui pardonner, dit-elle, si toutefois il cesse de la frapper et de l’insulter. « Il faudra beaucoup de pédagogie, plaide encore l’avocat, et ce n’est pas en prison qu’il apprendra. » C’est que le procureur a requis une peine de prison ferme avec maintien en détention (il est en détention provisoire depuis hier), pour « ces faits extrêmement graves ». Le prévenu semble se défausser en permanence, reconnaît « une gifle », le 26 au soir. « Ce qui est sûr, c’est que madame a le nez cassé », le recadre la présidente, Jeanne Delatronchette.

 

Pluie de coups, sur le visage, la tête, le corps, elle s’accroupit, il continue avec ses pieds

Le 26 au soir, à Montceau-les-Mines, une femme appelle le commissariat : elle entend une femme crier, chez ses voisins de palier. Un équipage se déplace, croise le couple dans la cage d’escalier, avec le petit. La femme fond en larmes en les voyant, et explique, en mimant les gestes, que son mari l’a frappée. Les hématomes sont déjà visibles et elle saigne du nez. Le médecin légiste fixe une ITT de 10 jours. Le mari avait un peu bu, trop heureux d’avoir réussi son passage de l’examen du code de la route. Puis il lui a demandé une relation sexuelle. Elle refuse, car « il ne pense qu’à son plaisir et puis il est trop violent ». Pour finir, elle accepte. Il en veut une seconde, mais le petit s’est réveillé, elle va s’occuper de lui. Il s’énerve, « tu es une pute, tu me trompes ! ». Pluie de coups, sur le visage, la tête, le corps, elle s’accroupit, il continue avec ses pieds.

 

La défense salue l’intervention des voisins

C’est le récit de la femme. Lui il dit que ça n’est pas vrai, et puis qu’elle est dérangée psychiquement. Ce ne sont peut-être pas ses mots exacts, car un interprète les traduit. Il a dit « dérangée », on doit faire avec. Elle a cherché à s’enfuir, le 26 au soir, mais il l’a rattrapée par les cheveux, et il a recommencé. Elle a peur de lui, rapporte la présidente qui a lu les procès-verbaux des auditions. Quand elle parle de séparation, il parle de l’égorger, et vu les actualités de ce funeste jeudi, on peine de voir resurgir cette barbarie dans la salle du palais de justice, fut-ce à travers des mots. Le médecin constate, outre les hématomes, une déviation de la cloison nasale, et une fracture des os propres du nez. Maître Marceau salue l’intervention de la voisine et le témoignage d’une autre, « c’est un fait peu courant, de se soucier ainsi de ce qui se passe dans un autre foyer ». Le procureur s’y réfère pour demander une peine lourde pour un homme au casier vierge. L’homme demande pardon à sa femme. Elle semble dégourdie, elle est peut-être plus instruite que lui, on ne sait pas.

 

Si la vie conjugale reprend, ça sera « à ses risques et périls »

Ils sont bien habillés, ces deux-là. Avec goût. Une forme d’élégance réelle, avec des moyens simples. Les deux. Ils sont bien habillés mais finalement chacun n’a que l’autre ici en France. Le procureur a bien cerné cette difficulté, et il entend qu’elle ne demande pas à être séparée de son mari là, maintenant, par décision de justice, de la justice française, mais il estime que si la vie conjugale reprend, ça sera « à son détriment, à ses risques et périls ».  Maître Marceau insiste sur le manque d’éducation de cet homme partiellement ou complètement incapable de lire et d’écrire. Il demande, lui, une peine mixte, soit une peine ferme puis un suivi assortis d’un sursis, car un suivi peut provoquer, par la contrainte, une insertion dans la langue, déjà, puis dans les règles en vigueur ici.

 

7 mois de prison ferme, 2 ans de suivi et de probation

Le tribunal condamne le mari à une peine de 12 mois de prison, dont 5 mois sont assortis d’un sursis probatoire de 2 ans, avec l’obligation de travailler ou de suivre une formation, et celle de suivre un stage de sensibilisation aux violences intra-familiales. Les 7 mois de prison ferme sont aménagés sous la forme du régime de la détention à domicile (avec port d’un bracelet électronique).

 

Un vœu pour le petit

Ce vendredi 30 octobre, nous nous réveillons, confinés. Cette femme également, confinée avec cet homme détenu chez eux. Les 31 prochains mois de leur vie seront accompagnés par le service pénitentiaire d’insertion et de probation (SPIP). Si une nouvelle scène parvenait aux oreilles des voisins, il serait certainement incarcéré. Le tribunal fait un pari sur l’avenir. Compte-tenu de la volonté de la victime de tenter le coup, et compte-tenu de sa situation ici (isolée, ne parle pas français, est mère d’un très jeune enfant), ce pari ressemble à la seule option possible dans l’immédiat, et peut-être rejoindra-t-il les vues idéales de la défense : « Que le petit puisse grandir dans les valeurs républicaines, avec des parents équilibrés sur le plan social. » En ce funeste jeudi, ça ressemble à un vœu national.

 

FSA

 

https://fr.wikipedia.org/wiki/Condition_des_femmes_en_Afghanistan

 

 



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