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jeudi 1 avril 2021 à 21:18

Fait divers : Vol dans une enseigne d’articles de sport de Montceau-les-Mines

6 mois de prison assortis d’un sursis probatoire renforcé pendant 2 ans



 



 

Il se promenait dans la boutique, les chaussures volées aux pieds mais avec l’étiquette encore accrochée après. C’est pas le voleur de l’année, et pourtant il a échoué sur le banc des comparutions immédiates ce jeudi 1er avril.

Ça s’est passé  , avant-hier, mardi 30 mars à Montceau-les-Mines. La sécurité a appelé la police : non content de porter des chaussures de randonnée toutes neuves, en ayant collé sa paire de baskets défoncées dans la boîte, il a trouvé le moyen, après avoir payé un survêtement en caisse, de chourer deux shorts sur un portant qui se trouvait après les caisses. Bien. Il est en état de récidive légale pour une condamnation datant de juin 2018. Le parquet décide de le faire juger selon la procédure la plus rapide et la plus dure qui soit, le juge des libertés et de la détention l’a placé en détention provisoire hier, 31 mars.

 

« Mon enfance… J’ai même pas envie d’expliquer, monsieur »

Il est réunionnais, il a 38 ans. Son casier comporte 19 mentions dont 13 condamnations pour des vols. « Pourquoi votre casier est-il chargé comme ça ? » lui demande le président Dufour. « Ma vie n’a pas été trop facile. C’est pas une raison pour voler, mais… » Enfant il fut placé en famille d’accueil. « Mon enfance… J’ai même pas envie d’expliquer, monsieur. » Puis il perd sa sœur et à cette évocation, il réagit. Le tribunal n’insiste pas, il est clair que la charge émotionnelle est forte, brutale, trop. Scolarité jusqu’en 5ème. Il semble vivre en métropole (si on se réfère à son casier) depuis 4 ou 5 ans. Comme nombre de ses compagnons d’infortune, il boit trop, mais dit n’attaquer qu’à la mi-journée et ne jamais prendre d’alcool fort. C’est une sorte de pauvre hère, qui erre, sauf lorsqu’un sursis mis à l’épreuve permet de le placer sur le chantier d’insertion de Brancion. Son conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation écrit qu’il respectait ses obligations.

 

« Content de gagner environ 800 euros par mois »

Deux ans, il a tenu les deux ans, content du boulot, content d’y aller, dit-il, content de gagner environ 800 euros par mois et fier d’avoir pu prendre un logement en location. Mais il est allé au bout du nombre de contrats de travail successifs possible et depuis peu de temps, il n’a plus rien. Anne-Lise Peron, substitut du procureur, reprend la procédure, dit qu’il a usé « d’un stratagème » en mettant ses baskets dans la boite des chaussures de rando. Son casier, son état de récidive légale, le vol « qui n’est pas un vol d’opportunité » : elle requiert une peine de 10 mois de prison dont 4 mois seraient d’un sursis probatoire, la révocation partielle de son sursis en cours, et son maintien en détention. « Madame la représentante du ministère public a passé plus de temps à justifier l’orientation en comparution immédiate qu’à caractériser la gravité de l’infraction », répond l’avocat.

 

« Il avait trouvé un sens à son quotidien, il a été stable pendant 2 ans »

Maître Marceau dit qu’aux jeunes stagiaires il explique que « la comparution immédiate doit permettre de réprimer rapidement une infraction qui cause un trouble à l’ordre public si important, qu’un délai plus long ne serait pas de bonne justice. Là, on a une comparution immédiate d’exaspération, elle ne relève que de son passé judiciaire. » Un stratagème ? « Il met juste ses baskets dans la boîte, il n’enlève pas l’étiquette des chaussures neuves ! Non, ce n’est pas astucieux. » L’avocat plaide des revenus modestes et un vestiaire plus que modeste, et surtout la possibilité d’une stabilité quand il a un cadre de travail, un salaire, des horaires, un travail constructif. « Sur le chantier de Brancion, il avait trouvé un sens à son quotidien, il a été stable pendant 2 ans, et là il se retrouve brusquement sans rien… Il a montré qu’il est capable d’être inséré, il lui faudrait un travail d’intérêt général ou un sursis probatoire renforcé. On peut lui ouvrir des portes que l’incarcération ne lui a jamais ouvertes. »

 

Sursis probatoire avec accompagnement renforcé

 

Le tribunal déclare le prévenu coupable, le condamne à une peine de 6 mois de prison assortis d’un sursis probatoire renforcé pendant 2 ans. Obligations de travailler, de soins (en addicto), et d’intégrer le dispositif AIR (accompagnement individuel renforcé) piloté par l’association d’enquête et de médiation (AEM).

L’homme ne comprend pas tout, tout de suite, puis : « Là, je peux travailler et être payé ? – Oui. Mais je vous préviens, monsieur, si le tribunal devait vous revoir, ça ne se passerait pas bien. – Mais moi, j’ai plus envie de revenir ! » Il avait si peur de retourner en prison… « Pour une paire de godasses, j’ai tout mis par terre ? – Et deux shorts, monsieur. »

 

 

Florence Saint-Arroman

 

 







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