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mardi 27 juillet 2021 à 11:28

Faits divers à Montceau

« Je ne voulais aucun mal aux policiers. J’étais énervé qu’on n’ait pas pris ma plainte »



 



 

 

Mercredi soir, vers 23 heures, le prévenu a sonné au commissariat de Montceau alors qu’il passait devant. Il voulait déposer plainte contre un monsieur qui, pense-t-il, l’espionne à son domicile via un objet qu’il lui a donné. C’est la nuit, le chef de poste refuse d’ouvrir. Le gars lance des insultes puis s’éloigne.

2.76 grammes d’alcool par litre de sang, et un petit couteau de cuisine dans chaque main

Le policier de faction prévient alors un équipage qu’un homme l’a insulté, qu’il est visiblement en état d’ivresse, deux autres policiers retrouvent alors l’énergumène. Las, celui-ci n’est pas coopératif, il a 2.76 grammes d’alcool par litre de sang, et un petit couteau de cuisine dans chaque main, il refuse de les lâcher. Il fait face aux policiers, tient des propos incompréhensibles… Les agents diront avoir envisagé de sortir leurs armes de service, plaidera maître Ronfard, pour montrer à quel point cette situation fut insécurisante pour eux. Par chance, ils sont équipés d’une arme intermédiaire, de taser et le fauteur de troubles finit au sol, puis il passe en cellule de dégrisement, puis en garde à vue.

« Je ne voulais aucun mal aux policiers. J’étais énervé qu’on n’ait pas pris ma plainte »

Il expliquera n’avoir jamais eu d’intention agressive envers les forces de l’ordre, et à l’audience il répète ce qui dans son cas est une vérité : « Le problème : j’avais bu beaucoup de bières. Je ne voulais aucun mal aux policiers. J’étais énervé qu’on n’ait pas pris ma plainte, et je rentrais. » Il tenait ferme ses deux couteaux, pour aller les rendre à leur propriétaire dit-il. Ce point est douteux, car vu le contexte on pense que c’était surtout pour faire peur et se protéger ainsi d’agressions possibles. Quand on a presque 3 grammes d’alcool par litre de sang, on doit se défendre moins bien, et on est surtout parti dans les limbes de son esprit.

« Vous êtes spécialiste de l’alcool et des couteaux ! »

La vice-procureur le dit : « Monsieur à jeun et monsieur alcoolisé, c’est pas le même. » Le président le dit : « Vous êtes spécialiste de l’alcool et des couteaux ! » Le casier judiciaire du prévenu le dit : 16 mentions dont plusieurs condamnations pour conduite sous l’empire de l’alcool, port d’arme blanche de catégorie D (couteau) et des doublettes couteau/alcool.  « Qu’est-ce qui se passe ? lui demande le président. – Il y a un problème d’alcool. – Oui, mais vous eu des sursis probatoires, avec des soins, un suivi. » Le malheureux répond qu’il est allé deux fois en cure, mais a laissé tomber quand on l’a appelé pour du boulot. Maître Charlotte Massard le plaide : « Monsieur est dans un état dépressif. Ce qui le fait tenir, c’est son boulot. » C’est-à-dire quelque chose d’utile à tous, de valorisant pour lui, et de constructif, d’autant plus constructif qu’il est maçon.

C’est un malheureux

Mais il chauffe le parquet qui représente, lui, la société, et qui estime que c’est un homme violent quand il a bu, que l’alcool le rend dangereux, et qu’il s’en faut de peu qu’il passe « de l’autre côté » c’est-à-dire finisse par blesser voire tuer quelqu’un. Rien à son casier de cette sorte, mais bon. Le discours de la procureur a certes du sens en général, mais ne semble pas parler réellement de celui-ci, né à Mayotte il y a 34 ans, qui n’a aucune famille auprès de lui, vit seul, n’a pas d’enfants. C’est plutôt le récit d’un gâchis, d’une vie gâchée qui ne cesse de se mettre en scène tantôt en blanc (le travail), tantôt en noir (alcool et un couteau avec soi). C’est ce que plaide son avocate, mais comme il a mis en échec les suivis, le parquet ironise : « Quand monsieur sera touché par la grâce, on pourra peut-être envisager de travailler avec monsieur. »

13 mois en prison

Monsieur semble surtout touché par son malheur et ses émotions, il pleure presque. Il ne doit rien comprendre à ce qu’il tourne, et puis l’alcool, à force, ça abîme tellement. Il était arrivé imbibé à une convocation du juge d’application des peines. « Je m’en souviens plus. » Alors il part en prison. Le tribunal le condamne à une peine de 9 mois, ordonne son maintien en détention. Interdiction de porter une arme pendant 5 ans. « Les couteaux, ils restent chez vous, monsieur. » Révocation du sursis probatoire à hauteur de 4 mois, incarcération immédiate.

Florence Saint-Arroman

Les policiers demandaient des dommages et intérêts à hauteur de 1500 euros pour ceux qui ont usé du taser, et 600 euros pour celui qui se trouvait à l’intérieur du commissariat et a entendu des insultes. Le tribunal leur accorde 500 euros chacun pour ceux qui étaient dehors, et 100 euros pour le chef de poste cette nuit-là.

 

 

Photo d’illustration



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