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lundi 2 janvier 2023 à 19:13

Faits divers : vol à l’arraché d’un sac à main à Montceau

Faute d’expert psychiatre, le tribunal doit laisser sortir de prison un homme qui est « en rupture totale de soins »



 

Ce lundi 2 janvier, un seul dossier est au rôle des comparutions immédiates, un dossier de Montceau. Sauf que : le tribunal ne peut pas juger parce que l’expertise psychiatrique, obligatoire pour toutes les personnes placées sous protection civile (tutelle ou curatelle) n’est pas rentrée.

Mais le tribunal ne peut pas renvoyer le dossier non plus parce qu’à 14h15, l’escorte et le prévenu ne sont pas arrivés. « Les geôles sont vides », annonce la greffière qui est descendue y jeter un œil, parce que les écrans placés à l’accueil ne fonctionnent pas. On est au seuil du nouvel an, et même si on se doute bien que rien n’a changé du simple fait qu’un cycle de 365 jours s’est achevé, on est un peu déçu de le constater.

Vol à l’arraché, 5 euros dans le sac

On a fini l’année par un article qui évoque tous ces problèmes*, on commence l’année pile en plein dedans. Mais il ne faut pas désespérer de tout : à 14h30 l’escorte arrive ! Ouf. Le prévenu est un homme âgé de 43 ans, né à Firminy. Il vit à Montceau-les-Mines où il a, le 26 juillet dernier, arraché son petit sac à une dame presque nonagénaire qui, témoigne maître Trajkovski, ne s’en est pas encore remise. Elle a peur, désormais. Dans son petit sac, il y avait quelques euros… L’agresseur est allé s’acheter une bière. Tout ça pour ça.

En rupture totale de soins

« Il est en rupture totale de soins, il est dans le déni », vient dire à la barre une curatrice de l’UDAF 71. Il fut diagnostiqué comme souffrant de schizophrénie, ne prend pas de traitement. Il perçoit l’allocation pour adultes handicapé et ça doit dater de vieux, parce qu’il l’appelle ça la « PDH Cotorep ». Ça date de vieux et par-dessus ça, il a des problèmes de compréhension, l’audience le montre. Il fut placé sous contrôle judiciaire le 27 juillet dernier, mais il n’a répondu à aucune convocation de l’AEM à Chalon-sur-Saône, aussi son contrôle fut révoqué et il est en détention provisoire depuis le 3 novembre dernier. Il dit que les conditions sont difficiles en prison, « et ma curatrice n’est pas à l’écoute de ma personne, elle ne m’a pas envoyé d’argent ».

« J’ai pas assez pour prendre un taxi »

L’argent… Il explique au tribunal qu’il n’est pas venu à Chalon aux rendez-vous fixés par son contrôleur judiciaire, faute d’argent : « J’ai pas assez pour prendre un taxi. » Ça c’est sûr. La curatrice explique qu’il a des dettes, entres autres de loyer, et puis qu’il néglige l’entretien et l’hygiène et qu’il faut payer une société de nettoyage qui vient chez lui, et qu’une fois tout payé, on lui donne 130 euros par semaine. « Le train aussi, c’est assez cher » dit encore le prévenu à l’appui de ses défections. Il vit sous curatelle renforcée.

Cinq experts ont refusé la mission… On n’a plus assez d’experts psychiatres

Le président Madignier voit dans le dossier que la justice a demandé à 5 experts psychiatres successifs de s’occuper de monsieur : ils ont tous refusé, l’un d’eux ayant l’impudence de poser ses conditions : « un devis hors norme et un délai plus long ». « Je ne sais pas comment il faut entendre ‘un devis hors norme’ » remarque avec délicatesse le président. « Ce n’est de toute façon pas un cas prévu par la loi », dit le procureur de la République.
Carence d’experts psychiatres et ses conséquences en chaîne… ça craint vraiment. Ça craint d’autant plus que le mandat de dépôt qui maintient le prévenu écroué expire le 4 janvier, soit après-demain… Compte-tenu des contraintes de procédure, le procureur en tire la conséquence principale : le placement du prévenu sous contrôle judiciaire.

Comment border un cadre qu’il puisse tenir ?

Le président est embêté : il est patent que le prévenu a grandbesoin de voir un psychiatre, puis d’un cadre de soins, mais le tribunal ne peut l’y contraindre sans l’avoir jugé et voilà qu’il est contraint, lui, de le remettre en liberté. Comment border le cadre ? « Il faut lui donner un cadre qui soit tenable par lui », plaide maître Duquennoy. Exit donc les convocations ailleurs qu’à Montceau-les-Mines. Que fait le prévenu de ses journées ? « Je fais de la musculation et de la natation. » … « Déni total » disait la représentante de l’UDAF 71, on peut la croire.

Vu les difficultés, le tribunal délibère longuement, puis : renvoie le jugement au 27 mars, ordonne le placement de cet homme sous contrôle judiciaire. « Vous allez sortir de prison. – Ah merci ! Merci beaucoup ! » Le prévenu est trop content, mais n’a pas compris que le tribunal n’a pas le choix. 

« Vous avez manifestement des troubles mentaux et vous devez vous faire suivre »

Il a l’interdiction de tout contact avec la victime (qu’il ne connaît au demeurant pas), l’obligation de pointer une fois par semaine au commissariat de Montceau, et une obligation de soins, « cas échéant sous le régime de l’hospitalisation » précise le président, qui insiste auprès du prévenu dont on se demande bien ce qu’il va en comprendre, tout à la joie de sortir, parlant de prendre un TGV pour rentrer (sortir de la prison de Varennes-le-Grand quand personne ne vient vous chercher, est une galère sans nom, TGV ou pas, ndla). « Vous avez manifestement des troubles mentaux et vous devez vous faire suivre. Vous devez voir votre médecin traitant qui vous orientera vers un psychiatre ou vous demandez à être hospitalisé. » Il va falloir que la nécessaire expertise psychiatrique ait lieu…

L’interdépendance entre les uns et les autres…

A noter qu’un expert psychiatre s’était présenté au centre pénitentiaire de Varennes-le-Grand. Il venait de Lyon mais n’a pas pu voir le détenu « qui était soit hospitalisé, soit à l’isolement, mais ça ne ressort pas clairement du dossier », précise le procureur de la République. Quelqu’un a-t-il été négligent à un moment donné ? Vu les conséquences en chaîne, ça craint.

Florence Saint-Arroman

https://www.info-chalon.com/articles/2022/12/29/75932/vivement-2023-a-chalon-sur-saone-oui/

 

 

 



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