Lors de notre précédente contribution, nous avons vu que le développement des technosciences est si rapide qu’il prend de vitesse toute réflexion. A peine imagine t-on une avancée scientifique qu’elle est déjà effective et nous oblige à penser à postériori alors même que d’énormes questionnements surgissent. L. Ferry s’interroge « s’agit-il de rendre l’humain plus humain ou, au contraire, le déshumaniser, voire engendrer artificiellement une espèce nouvelle, celle des posthumains ? » ( la révolution transhumaniste). A cette question certains comme Ray Kurzweil (Pape du transhumanisme extropien, directeur de l’ingénierie chez Google et président de l’université de la singularité -le grand centre de recherche dans la Silicon Valley financé par Google-) plaident pour la « technofabrication » d’une posthumanité en mobilisant la robotique et l’intelligence artificielle tout autant que la biologie.

 

L’homme n’existe-t-il que pour être dépassé, comme l’annonçait Zarathoustra prophète iranien en son temps? Pour l’extropianisme (courant ultra du transhumanisme), la maladie, la vieillesse, la mort ne soulèvent plus de questions métaphysiques, religieuses, morales, éthiques, philosophiques,… Ce sont de simples problèmes techniques qui peuvent être résolus par la biologie et l’informatique. Cette volonté de puissance Nietzchéenne (dans le sens où elle recherche l’intensification de sa puissance intrinsèque) s’est incarnée totalement dans la technique.

 

 

Eradiquer la maladie : oui mais à quel prix ? « l’amélioration/augmentation » prônée par les extropiens passe par la modification de nos données biologiques internes or, prévient L.Alexandre (scientifique, spécialiste du séquençage de l’ADN) « notre génome est bien fragile. Il est animé par des dizaines de mécanismes plus subtils les uns que les autres et une modification minime de l’un d’entre eux peut avoir des conséquences catastrophiques ».

 

 

Eradiquer la vieillesse : « personne n’a jamais vécu 200 ans. Le but de Google, avec sa filiale Calico financée à coups de millions de dollars, est de permettre un jour à l’être humain (que sera-il devenu alors ?) d’arriver à cet âge voire davantage »(L. Ferry -Le Point 18 aout 2016). Voilà qui, à l’évidence, posera nombre de problèmes sur bien des plans :

 

 

– Sur le plan démographique : Comment éviter la surpopulation ? La mort ne surviendrait plus que de l’extérieur (accidents, attentats,…)
– Sur le plan economique et social : “face à ces nouveaux pouvoirs de l’homme sur l’homme, les familles seront loin d’être à égalité. L’ingénierie génétique coûtera très cher et les différences de fortune seront, dans ces conditions, moins supportables que jamais puisqu’elles deviendront tout simplement question de vie ou de mort » (Michael Sandel – la perfection en procès : l’éthique à l’âge de l’ingénierie génétique). M. Sandel est membre du comité d’éthique mis en place en 2002 par la présidence américaine pour réfléchir aux conséquences de la révolution des nouvelles technologies sur le plan humain).

 

– Sur le plan anthropologique : Deux humanités pourraient coexister, l’actuelle et « l’augmentée » (gràce à la fortune) et s’affronter. Israel Nisand (professeur de médecine) : « La science est sur le point d’engendrer une catastrophe, la création de deux humanités évoluant différemment pour la première fois dans l’histoire de l’humanité ».

 

– Sur le plan géopolitique : Les avancées des technosciences pourraient être utilisées à des fins belliqueuses : mise en place de vastes programmes « d’amélioration/augmentation » des populations pour les rendre « supérieures » aux ennemis potentiels. L’homme « augmenté » n’est d’ailleurs déjà plus une fiction dans l’armée américaine pour créer des supers soldats. « nous sommes en train de construire un Iron Man » ( l’homme de fer) s’enthousiasmait Barak Obama le 25 février 2014 lors d’une présentation publique du projet Talos .

 

 

Eradiquer la mort : Dans ce scénario extrême, cette quête irréelle de l’Ambroisie (substance divine qui assure l’immortalité aux Dieux de l’Olympe), le questionnement philosophique devient vertigineux. Ce qui serait immortel n’aurait plus de fin! Que peut signifier l’infinitude dans un environnement de finitude ? N’est-ce pas notre conscience de notre finitude qui nous pousse à agir ? Je sais que mon temps est limité; j’ai des choses à accomplir; je suis poussé par la conscience de mon temps limité à réaliser, entreprendre, créer, aimer, assurer ma descendance… »accepter qu’un jour on ne sera plus là rend la vie plus riche » (chanteur Sting).

 

Un exode sans fin : gràce aux astrophysiciens nous connaissons la finitude de notre planète et de notre soleil. La durée de vie habitable de la Terre est estimée entre 1,75 et 3,25 milliards d’années mais , selon ces savants, il est plus que probable que la vie s’éteigne bien avant et ce, notamment, à cause du réchauffement climatique et « grâce » à Donald Trump et ses amis nihilistes. « les humains seraient en danger avec quelques degrés de plus et, à force, seuls les microbes pourraient survivre à une forte augmentation des températures ( Et si nous devions émigrer plus vite que prévu) Mars est probablement notre meilleur parti; elle est très proche de nous et resterait habitable jusqu’à la fin de vie de notre soleil » (Andrew Rushby, chercheur du Nasa Ames Research Center).

 

 

Voilà qui explique l’intérêt accru pour la planète rouge. Le milliardaire Elon Musk a présenté le 27 septembre 2016, lors du congrès international de l’astronautique, son projet pour la colonisation de Mars. Il souhaite lancer une première mission habitée dès 2025. Les transhumanistes préparent, eux aussi, l’implantation de colonies sur Mars. Problème: sur Mars, la température moyenne est de – 63° et l’amplitude des variations journalières de température est énorme: mini – 143° et maxi + 20° soit 123° !Dans 5 milliards d’années, notre soleil sera 400 fois plus gros qu’aujourd’hui et cette gigantesque géante rouge, avant de se transformer en supernova, va happer toutes les planètes proches à commencer par Mercure, Vénus et la Terre. Quand à notre galaxie, La Voie Lactée, les astrophysiciens estiment qu’il n’y a aujourd’hui plus aucun doute sur le fait qu’elle sera percutée par la galaxie Andromède dans approximativement 4 milliards d’années, les deux galaxies se rapprochant l’une de l’autre à la vitesse de 430 000 km/h.

 

 

 

L’humain, ou ce qui sera devenu autre chose (un posthumain immortel espèrent les extropiens), sera condamné à un exode sans fin vers d’autres planètes, d’autres galaxies pour sauver son immortalité. Autre problème selon A.Rushby: « même si l’on découvrait une exoplanète habitable (bien plus que Mars) à moins de 10 années lumières de la Terre, il faudrait des centaines de milliers d’années pour s’y rendre avec la technologie actuelle des vaisseaux spatiaux ».

 

A suivre…

 

 

Jacky JORDERY, Serge ROIGT, Bruno SILLA – Montceau-les-Mines, le 27 décembre 2016

 

 

 

 

Pour mémoire voici la première partie :

 

https://montceau-news.com/politique/351322-cercle-autour-de-la-pensee-de-marx-novembre-2016-montceau-les-mines.html