Montceau : Mois de novembre, mois sans tabac…
Rien ne peut motiver les addicts à arrêter de fumer, pas même le prix du tabac
Lancé par le ministère de la Santé et de la Prévention et Santé publique France en partenariat avec l’Assurance maladie, le Mois sans tabac est de retour depuis le 1er novembre pour sa 7e édition.
Mais comment est perçu ce mois sans cigarette, par ceux qui en consomment beaucoup, mais aussi par les buralistes ? C’est ce que nous avons souhaité vérifier en nous lançant dans la tournée des bureaux de tabac, où nous avons forcément rencontré des fumeurs.
Petit accueil chez l’un des buralistes, qui ne souhaite pas s’exprimer. Dont acte. Nous continuons notre tournée, jusqu’au Relais Tabac Presse de la rue Waldeck Rochet, à Saint-Vallier. Pas facile d’intercepter le patron, car la clientèle est nombreuse, en ce dimanche 5 novembre.
Les clients eux, sont disponibles et répondent gentiment à nos questions. D’ailleurs, dans chaque bureau de tabac, deux files se distinguent : ceux qui viennent se procurer leur réserve de tabac et ceux qui viennent tranquillement jouer leur loto ou leurs tickets à gratter.
Lorsque nous abordons le sujet du mois sans tabac, tous dodelinent de la tête, de droite à gauche et de gauche à droite. Oui, ils savaient et d’ailleurs, ils s’en moquent ! Nous les avons questionnés sur le sujet. A noter qu’aucun d’entre eux n’a souhaité poser pour la photo…
Ainsi, voici les avis recueillis au 5e jour de novembre :
David : rien ne pourra me faire arrêter de fumer
« Non, le mois sans tabac ne me fait ni chaud, ni froid. Je fume un paquet de cigarettes, voire deux depuis longtemps. J’ai commencé vers mes 13-14 ans et je n’ai jamais arrêté. Je suis chauffeur routier et la cigarette me détresse.
Non, je n’ai pas peur de la maladie et rien ne pourra me faire arrêter de fumer. Et pourtant, cela représente un beau budget, car ma compagne fume aussi. Nous consommons chacun un paquet de cigarette à 11 euros pièce par jour.
Donc, si vous calculez, cela fait 11 euros x 30 x 2, nous avons un budget cigarettes de 660 euros par mois. Mais c’est un choix… ».
Lydie : la peur de la maladie m’a fait réduire ma consommation
« J’ai fumé ma première cigarette au lycée, mais à l’âge de 25 ans, j’ai arrêté pendant…20 ans. Mais le souvenir de la cigarette était fort et j’ai repris, mais avec seulement une dizaine de cigarettes par jour.
Pour moi, c’est un plaisir, un vrai déstressant. Cher, mais on ne peut pas tout avoir. Et j’avoue que ce qui pourrait me faire abandonner cette addiction, c’est la peur du cancer du poumon. A noter que je ne fume pas en présence de mes petits-enfants ».
Martine : J’ai arrêté toute seule pour pouvoir garder mes petits-enfants
Je fumais depuis 20 ans quand j’ai décidé d’arrêter le tabac. Cela a duré un an. Après le décès de mon compagnon, j’étais stressée et j’ai voulu essayer la cigarette électronique, puis les gommes et rien n’a fonctionné. Le sevrage a été très long et très dur.
Maintenant, je fais des économies sans ces achats de cigarettes et je peux gâter un peu plus mes petits-enfants ».
Carima : seule une nouvelle grossesse pourrait me motiver pour stopper le tabac
« J’ai 39 ans et je n’arrive pas à arrêter de fumer, mois sans tabac ou pas. Mais avec un tarif à 11 euros pièce, ça calme rapidement. J’ampute chaque mois mon budget de la somme de 100 euros. Un paquet de cigarette me fait trois jours, mais c’est très addictif ! ».
Ajoutant : « Ce qui pourrait me motiver pour arrêter de fumer ? Une grossesse peut-être. Mais j’ai déjà des enfants et ne les enfume pas avec mon tabac, car je ne le fais pas en leur présence ».
Gilbert : J’ai dit adieu à la cigarette à la naissance de ma fille, il y a 31 ans.
« Il y a trente ans que je ne fume plus. En fait, depuis que ma fille est née, je m’en étais fait le serment. Je fumais à l’époque deux paquets de cigarettes par jour et j’ai vraiment fait des économies. A l’époque, je fumais des « Dunhill » qui sont maintenant vendues entre 14 et 15 euros le paquet !
Pour mes deux filles, je me suis sevré tout seul, sans patchs, ni aide quelconque. Comme quoi la volonté sert à quelque chose. Maintenant, l’odeur du tabac froid m’insupporte. Et puis, j’y ai gagné en souffle car avant, ce n’était pas le cas ».
Au bureau de tabac Le Barbès
Un bel accueil convivial, avec le sourire, de ce couple qui officie dans la boutique depuis 5 ans et demi. Les sourires sont francs, les yeux pétillent. Bref ! Un régal.
Romain : Je ne suis pas motivé pour arrêter car ce sont des habitudes qui ont la vie dure
« Je fume un paquet de cigarettes par jour et ce, dès le matin et depuis l’âge de 16 ans. C’est-à-dire depuis le début de mon apprentissage à Mercurey, dans la filière boucherie. Ma compagne est elle aussi fumeuse et à nous deux, le budget tabac se monte à 600 euros mensuels.
Je sais que cela va en faire râler quelques-uns, mais même si le paquet était à 20 euros, je l’achèterais quand même. C’est vraiment une addiction. Mais aussi une habitude. Pour me faire arrêter, il faudrait que le café, l’apéro, les réunions de copains soient interdites. En effet, c’est dans ces moments conviviaux que je fume le plus.
Ma compagne et moi avons pourtant investi pour 200 euros de cigarettes électroniques, avec les produits et rien ! ça n’a pas fonctionné pour nous. Je crois moyennement au mois sans tabac pour se libérer de cette addiction, donc, je ne tente pas. Quant à la maladie, on se croit invincible, et puis un jour… ».
Pas de baisse du chiffre d’affaires pour le mois sans tabac, bien au contraire…
Pour sa part, le buraliste indique que le cerveau des fumeurs est conditionné : je consomme un paquet par jour et j’aime ça. Et si je vois dans une publicité à la télé que quelqu’un fume, je ne peux m’empêcher de le faire aussi, par mimétisme.
J’ai commencé à 12 ans et je ne suis ni prêt, ni motivé pour arrêter. Pendant le mois sans tabac, on arrête pour se donner bonne conscience, puis on repart de plus belle. Le lobbying alimentaire est immense, mais celui du tabac est gigantesque. Tout est question de fric…
Dans un autre registre, rien ne me fera arrêter de fumer, même pas la maladie. Vous savez, je connais des gens qui sont décédés d’un cancer du poumon et qui n’avaient jamais fumé. On prend autant de risques en traversant la route ! Non, ce qui fait mal, c’est l’abus…
La contrebande qui fait mal
« A mesure que la fiscalité tabac évolue à la hausse, le marché parallèle s’amplifie et prend des proportions inquiétantes. 28,4 % de cigarettes achetées en France sont réalisées en dehors du circuit réglementé des buralistes et proviennent du substantiel marché parallèle et donc de ventes illicites ». Et ça, c’est la Confédération de buralistes qui l’a dit…
A mesure que la fiscalité tabac évolue à la hausse, le marché parallèle s’amplifie et prend des proportions inquiétantes. 28,4 % de cigarettes achetées en France sont réalisées en dehors du circuit réglementé des buralistes et proviennent donc du marché parallèle et donc de ventes illicites.
« Nous voyons bien que certains clients achètent leur papier à cigarette chez nous, mais ils n’achètent jamais de tabac » précise un buraliste.
Ajoutant : « Si les cigarettes sont achetées en Espagne, c’est bien. Par contre, si c’est dans les pays du Maghreb, ce n’est pas la même qualité ! ».
Janvier 2023
Une très importante fabrique de cigarettes de contrefaçon a été démantelée, en janvier 2023, près de Rouen par la gendarmerie. Celle-ci a saisi plus de 100 tonnes de produits, d’une valeur de 13,7 millions d’euros. Une paille !
Nelly Desplanches