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lundi 30 juin 2025 à 05:56

La Claudine aime les week-ends, mais parfois le lundi est le bienvenu.

  "Canicule 2 : la Claudine sous dôme, chronique d'une surchauffe nationale"



 

 

Après une semaine à transpirer comme une marathonienne asthmatique aux chaussures trop serrées, la Claudine était heureuse de quitter un bassin minier quasi tropical pour aller dans sa famille au nord de Lyon. Une heure et demie de voiture bien climatisée allait la revigorer, lui redonner le moral.  Las, que nenni, ma pov’ Lucette c’est le jeu, tout le long du trajet les panneaux lumineux ne cessaient de proclamer « Canicule : hydratez vous ». La Claudine s’est même fait la réflexion «  boire ou conduire, il faut lire vos inepties »

Car, Mesdames, Messieurs et autres, la canicule 2025 ne prend pas de repos, coincée qu’elle est entre dôme brûlant et vide glacial des esprits. De ce dernier, la Claudine pourrait vous en parler pendant un moment, tant ce qu’elle a lu, entendu et vu lui a mis le cerveau en ébullition.

Il faut bien l’admettre, le pays a fondu, littéralement, entre le 22 et le 29 juin. Et pourtant, c’est bien la langue que certains ont réussi à rendre encore plus sèche que l’air ambiant. Car sous les 40°C réels, on a vu se dégager une autre forme de chaleur : celle de l’absurde, du commentaire creux, de la déclaration tiède dans un pays à feu doux.

Comme on dit à la sortie des cuisines des restaurants étouffant de chaleur, « chaud devant, et pas qu’un peu ».

 

La Claudine aurait bien pu croire à une caricature météo : 41,5°C à Céret le 25 juin, Paris transformée en étuve, 73 départements en vigilance orange. Du coup, à en croire tout le monde et même plus, les climatiseurs ont fait un burn-out, les rues suintaient l’asphalte et même les arbres avaient l’air suppliants de demander un mojito.

Mais ce qui a sidéré la Claudine, ce n’est plus la chaleur — devenue l’habituelle prématurée de nos étés —, c’est ce qu’on en a fait : une cacophonie de conseils, d’alertes et de non-décisions enveloppées dans un emballage d’apparente bienveillance. Par ces temps de dérèglement climatique, nous avons assisté à un déluge de blablas brûlants, à une logorrhée incendiaire.

 

« Il n’y a pas à Beauvau de bouton pour arrêter la France », a déclaré le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, comme s’il commentait une panne de PlayStation. Traduction : débrouillez-vous. On dirait presque qu’il attend que le thermomètre s’excuse.

La gestion gouvernementale repose alors sur une confiance mystique envers les maires, les entreprises et… les tuyaux d’arrosage. Pendant ce temps, les cellules de crise se réunissent — à 20 h 45, en costume, devant un tableau Excel — pendant que les EHPAD transpirent l’angoisse silencieuse.

 

La Claudine pense que lorsqu’il fait trop chaud, trop lourd, que l’on a du mal à respirer, le mieux c’est justement de nous laisser respirer, pas de nous en ajouter une couche façon chape de plomb brulante. Et bien non, pas question, nous avons eu droit sans qu’on nous laisse le temps de reprendre notre souffle à la canicule mode d’emploi anxiogène.

La Claudine a failli exploser de colère, puis de rire lorsqu’elle a touché du doigt la stupidité lénifiante et hors sol de tout ça.

Du côté des médias, c’est la grande tambouille estivale. Une louche d’angoisse, une pincée de clichés, un zeste de conseils inutiles.

– « Buvez de l’eau. » Merci, on y avait pensé entre deux coups de soleil.

– « Restez au frais. » Encore faut-il avoir un chez-soi climatisé.

– « Sortez les éventails, pas les bikinis. » Le tout, avec un ton de chroniqueur lifestyle, entre une recette de gaspacho et une alerte canicule de niveau 4.

À croire que l’on traverse une tragédie en pantoufles.

 

À longueur de bulletins météo et d’éditions spéciales avec présence d’experts triés derrière les volets, une expression a fait florès, est revenue à l’envie, sans trop d’explications : le dôme de chaleur, le dôme de chaleur… et le vide

Le dôme de chaleur, lui, reste. Costaud, muet, impénétrable. Comme les déclarations officielles. Il flotte au-dessus de l’Europe comme une cloche thermique, bloquant la pluie, l’air frais, et parfois même le bon sens.

Et pourtant, derrière le gag, la réalité est dure : les canicules sont là pour rester, plus précoces, plus longues, plus brutales. « June is the new July », dit-on à Washington. En France, c’est plutôt « juin est le nouveau cauchemar climatisé pour riches ».

La Claudine en a conclu : « Rions (un peu) pour ne pas fondre. »

Face à cette chaleur grasse et aux réponses maigres, que reste-t-il ? L’humour. L’ironie légère comme une menthe à l’eau tiède. Et une forme de résilience passive, héritée de décennies de “démerde” nationale : s’installer dans sa salle de bains, plonger les pieds dans une bassine, et méditer sur l’absence de plan sérieux pendant qu’on écoute France Info nous répéter qu’il fait anormalement chaud. Non ? C’est vrai ? On ne s’en serait pas douté, râle la Caudine dans son coin.

La canicule 2025, c’est l’alliance paradoxale d’un climat en feu et d’une parole publique glaciale. Trop chaude pour être supportée, trop tiède pour qu’on s’y oppose franchement. On nage entre burlesque et tragique, avec des bulletins météo qui tournent au sketch, des alertes sans plan d’action, et une chaleur si dense qu’elle empêche jusqu’à la révolte.

Alors, voici le conseil spécial Claudine : « respirez doucement, restez au frais comme vous pouvez, et surtout : buvez… pas les paroles des ministres, c’est encore ce qui vous dessèche le plus vite. »

Claudine sous dôme : chronique d’une surchauffe nationale… et la Claudine en arrête là, elle a pris chaud à l’écriture.

 

Gilles Desnoix

 

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