Montceau les Mines : Conférence de Sébastien Joly
« La Ligne de démarcation entre histoires et mémoires »
L’auditorium de la médiathèque de Montceau accueillait ce vendredi soir Sébastien Joly pour la dédicace de son livre « La ligne de démarcation entre histoires et mémoires », ainsi que pour une conférence fort instructive et émouvante sur le sujet.
La cinquantaine de personnes venues assister à l’événement n’a certainement pas regretté son choix. Sans micro, d’une voix assurée, le professeur d’histoire du collège Anna Frank de Montchanin a réussi à tenir en haleine son public pendant près de deux heures avec des explications historiques pertinentes ainsi que des anecdotes et témoignages passionnants, tragiques et poignants.
Après un bref rappel du contexte national et local au début de la Seconde Guerre mondiale, puis une définition de cette fameuse ligne de démarcation – cette frontière parfois nébuleuse qui, entre 1940 et 1943, partageait la France en une zone occupée rattachée au Reich allemand et une autre plus ou moins libre régie par le gouvernement de Vichy – Sébastien Joly est revenu sur la situation de l’époque en Saône-et-Loire, et plus particulièrement à Montceau-les-Mines : « La ville était coupée en deux et le premier tracé de la ligne suivait le canal du Centre pour ensuite être repoussé vers Saint-Romain»
À l’appui de photos, le professeur nous a ensuite replongés dans cette période de l’histoire à la fois fascinante et effrayante, en évoquant et détaillant les nombreux contrôles effectués côté allemand et français, les liens qui pouvaient se lier entre la population locale et les occupants germaniques, ainsi que les petites combines utilisées par les femmes et les enfants pour passer plus facilement la ligne de démarcation et mener des actes de résistance.
Tout au long de la conférence, Sébastien Joly a surtout littéralement scotché son auditoire en racontant, à travers ses rencontres, ses recherches d’archives et ses témoignages recueillis, les histoires extraordinaires de nombreux « exodiens », ces personnes qui, pendant trois années, se sont lancées sur les routes de France pour fuir l’avancée allemande. C’est le cas notamment d’Irene Nemirovski, cette romancière ukrainienne juive qui a fui Paris pour Issy-l’Évêque en Saône-et-Loire, mais qui n’échappera ni à la gendarmerie de Toulon-sur-Arroux en juillet 1942, ni aux camps de concentration où, hélas, elle sera déportée. C’est également le cas de Camille Chevallier et d’André Jarrot, tous deux garagistes, l’un en zone occupée, l’autre en zone libre, qui « exerçaient » en tant que passeurs et partageaient les mêmes réseaux de résistance. Si on connaît bien le destin héroïque du second, il s’avère que le premier n’a pas partagé le même sort que le futur maire de Montceau-les-Mines. Dénoncé, le passeur dijonnais est fusillé dans sa ville natale en 1942.
Le récit de la petite Gisèle avec sa bicyclette à la Garenne, les missions de résistance de Jeanine Durand à Saint-Vallier, le destin extraordinaire d’Angèle Lamanthe, sauvée aux portes de la mort par un soldat américain, celui non moins fabuleux de Jeannette Guyot, cette grande résistante dont on ne découvrit l’héroïsme qu’à sa mort à Sevrey en 2016, l’épisode tragique de la petite Esther, morte dans les bras de son père à Cersot… Toutes ces histoires mettent en lumière la vie de ces illustres inconnus. Beaucoup d’autres tout aussi émouvantes, se trouvent dans le livre de Sébastien Joly « La ligne de démarcation entre histoires et mémoires ». Pour les absents de ce week-end, le professeur d’histoire dédicacera de nouveau son livre au marché du livre à Blanzy le 12 octobre prochain.
Nicolas Gidaszewski