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mardi 25 novembre 2025 à 04:43

25 novembre : Journée internationale contre les violences faites aux femmes.

Symbole fort, levier politique ou simple vitrine ?



 

Fidèle à sa vocation d’observateur attentif des faits de société, Montceau News s’attache à offrir à ses lecteurs une information rigoureuse, documentée et mise en perspective. La Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes constitue un enjeu majeur, à la fois social, politique et humain, qui dépasse largement le cadre symbolique des commémorations. À travers cet article, notre rédaction propose un éclairage approfondi, fondé sur des sources certifiées et des données vérifiées, afin de comprendre l’origine de cette journée, ses implications concrètes, ses effets réels et les débats qu’elle suscite, en France comme dans le monde.

Chaque 25 novembre, la couleur orange envahit façades publiques, réseaux sociaux et manifestations citoyennes. Il ne s’agit pas d’une date commémorative anodine, mais de la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Créée sous l’égide de l’ONU, elle ouvre une période de mobilisation mondiale de 16 jours, jusqu’au 10 décembre, Journée des droits de l’Homme. Mais au-delà des discours et des campagnes de sensibilisation, cette journée a-t-elle produit des effets réels ? A-t-elle changé la loi, la justice, les politiques publiques et la vie concrète des femmes ? État des lieux, entre avancées, limites et controverses.

Le choix du 25 novembre renvoie à un événement tragique : l’assassinat, en 1960, des sœurs Mirabal, militantes dominicaines opposées à la dictature de Rafael Trujillo. Dès les années 1980, des mouvements féministes d’Amérique latine commémoraient cette date comme symbole de la lutte contre les violences faites aux femmes.

La reconnaissance officielle intervient en 1999, lorsque l’Assemblée générale des Nations Unies adopte une résolution désignant le 25 novembre comme Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. L’objectif est clair : briser le silence autour d’un phénomène longtemps considéré comme relevant de la sphère privée et encourager les États à agir.

Cette journée marque le début des « 16 jours d’activisme contre les violences basées sur le genre », une campagne mondiale coordonnée notamment par ONU Femmes, qui mêle sensibilisation, plaidoyer politique, actions éducatives et pressions sur les gouvernements.

Aujourd’hui, la journée du 25 novembre est reconnue dans la majorité des pays mais son application est inégale. Elle donne lieu à : des campagnes nationales de prévention, des conférences et débats publics, des marches et rassemblements citoyens, des actions de formation dans les écoles, institutions et entreprises, l’illumination en orange de monuments publics.

Cependant, cette reconnaissance n’équivaut pas à une volonté politique uniforme. Si certains États s’en servent comme point d’appui pour renforcer leur arsenal juridique, d’autres se contentent d’un affichage symbolique, sans politique ambitieuse derrière. Comme pour beaucoup de ces journées mondiales dédiées.

Contrairement à une idée reçue, cette journée n’est pas qu’un rituel médiatique. Elle s’inscrit dans un cadre plus large de réformes juridiques et institutionnelles. Cela a donné lieu à la création d’instruments internationaux structurants. Parmi les dispositifs majeurs figurent la Déclaration des Nations Unies de 1993 sur l’élimination de la violence à l’égard des femmes, la Convention d’Istanbul (Conseil de l’Europe), entrée en vigueur en 2014, qui impose aux États signataires des obligations contraignantes : prévention, protection des victimes, poursuites judiciaires. La directive européenne de 2024 contre les violences faites aux femmes, imposant aux États membres l’intégration d’infractions comme les mutilations génitales, les mariages forcés ou la cyberviolence dans leur droit pénal.

Ces textes ont conduit, dans plusieurs pays, à une redéfinition du viol basée sur la notion de consentement, la création de tribunaux spécialisés, des plans nationaux de lutte contre les violences conjugales, le développement de centres d’accueil et de numéros d’urgence.

Un impact mesurable… mais insuffisant

Les statistiques mondiales restent alarmantes car s’il existe un impact mesurable, tout cela reste nettement insuffisant. Une femme sur trois dans le monde a subi des violences physiques ou sexuelles au cours de sa vie. En 2023, plus de 51 000 femmes et filles ont été tuées par un conjoint ou un membre de leur famille. Le déclin de la violence est extrêmement lent : environ 0,2 % par an selon les estimations internationales.

Ces chiffres révèlent une réalité paradoxale : la prise de conscience progresse, mais la transformation structurelle reste lente. La loi progresse plus vite que les comportements, les normes sociales et les réponses institutionnelles.

À travers le monde, il existe quand même des exemples de transformations concrètes. Au Kenya, on est passé du plaidoyer citoyen à la loi locale. Dans plusieurs comtés, la mobilisation des jeunes et d’organisations locales pendant les 16 jours d’activisme a contribué à l’adoption de lois locales contre les violences sexuelles, incluant la création de centres de prise en charge pour victimes. Le Kenya illustre un cas où la pression sociale a débouché sur des mesures concrètes à l’échelle territoriale.

En Espagne, suite à des affaires terribles et très médiatiques, le législateur a adopté une réforme historique du consentement. La loi dite « solo sí es sí » marque un tournant majeur en inscrivant le consentement explicite comme cœur de la définition du viol. Bien que la réforme ne soit pas directement issue de la journée du 25 novembre, elle s’inscrit dans un climat de mobilisation féministe renforcé par ces campagnes internationales.

Au Bénin, il s’est produit une progression législative se heurtant à des défis énormes sur le terrain. Le pays dispose de lois précises contre les violences faites aux femmes, et le 25 novembre sert de cadre de mobilisation communautaire. Cependant, les difficultés persistent dans l’application, l’accès à la justice et la prise en charge effective des victimes.

Dans le monde entier, pour diverses raisons, idéologies ou contraintes religieuses, il existe des oppositions, des controverses et des résistances.

La lutte contre les violences faites aux femmes suscite également des résistances politiques et idéologiques. Plusieurs pays ont refusé ou combattu la ratification de la Convention d’Istanbul, l’accusant de promouvoir une « idéologie de genre ». La Turquie s’est même retirée du traité en 2021. En Europe centrale, des partis conservateurs ont mené des campagnes contre ce qu’ils perçoivent comme une ingérence culturelle.

Dans certains États, la journée du 25 novembre est minimisée, voire ignorée. Dans d’autres, elle est tolérée mais strictement encadrée, avec des restrictions sur les manifestations féministes.

La question peut se poser sur le côté symbolique ou sur un effet levier réel ?

Dans la réalité les réponses sont nuancées. Ce que permet la journée, c’est une visibilisation massive d’un problème longtemps occulté, une mobilisation de la société civile, des pressions sur les décideurs publics, une coordination internationale.

Par contre ce qu’elle ne garantit pas a un fort impact sur les résultats : une baisse rapide des violences, une application effective des lois, une égalité d’accès à la justice, des financements suffisants pour les services de protection.

On peut donc affirmer que la Journée du 25 novembre agit comme un catalyseur, mais elle ne se substitue pas à une politique publique cohérente, durable et bien dotée. En effet son efficacité est conditionnée par la volonté politique. Les études montrent que les lois seules ne suffisent pas sans moyens humains et financiers, la formation des policiers, juges et personnels sociaux est déterminante, la prévention dès le plus jeune âge a un rôle majeur, l’impunité reste un problème central.

Ainsi, dans les pays où des politiques intégrées existent (prévention, justice, accompagnement, éducation), les résultats sont plus tangibles que dans ceux où la mobilisation reste ponctuelle.

À Montceau News, nous nous posons la question : « Quel rôle pour les territoires et la presse locale ?  »

À l’échelle locale, échelon essentiel de base ancré dans la réalité sociale, le 25 novembre joue un rôle essentiel : cette journée donne une visibilité aux permanences juridiques, aux associations d’aide aux victimes, aux dispositifs de signalement et aux initiatives éducatives.

Pour la presse locale, cette journée représente aussi un enjeu : informer sans banaliser, nommer les violences, contextualiser les faits divers, donner la parole aux victimes, mais aussi aux professionnels de terrain.

La Journée internationale du 25 novembre, symbole nécessaire, mais pas suffisant, n’est ni un simple folklore militant, ni une solution miracle. Elle constitue un outil puissant de mobilisation et de mise à l’agenda politique, mais son efficacité dépend de ce qui se passe le reste de l’année.

Son véritable impact se mesure dans la continuité : réformes législatives, budgets alloués, qualité de l’accueil des victimes, prévention dans les écoles, formation des institutions.

Face à un phénomène massif, structurel et global, le 25 novembre et les 16 jours qui suivent restent un rappel annuel indispensable : la violence contre les femmes n’est ni une fatalité ni un fait divers, mais un enjeu majeur de société, de justice et de démocratie.

 

 

Gilles Desnoix

 

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