Saint-Vallier – Couleurs de Femmes
Une suite de scènes poignantes qui remue et qui réveille

Née à Autun après dix-huit mois d’ateliers et de travail collectif, la pièce « Couleurs de Femmes » — écrite par Jean-Louis Terrangle et mise en scène par Elsa Dupuy de la Compagnie du Bonheur Vert — a été présentée vendredi 29 novembre à 20 h à la salle de l’Éclat de Saint-Vallier. Conçue avec des habitantes et habitants de l’Autunois, en collaboration avec le Réseau VIF et le Centre Social Émile Mottet, cette création mêle théâtre documentaire, témoignages et scènes du quotidien pour sensibiliser aux violences faites aux femmes. La troupe, entièrement composée d’acteurs amateurs guidés par un comédien professionnel, offre un spectacle d’une grande sincérité qui a profondément touché le public.
Vendredi soir, le public de Saint-Vallier a découvert une succession de scènes courtes et percutantes, chacune révélant une facette différente de la violence. Certaines abordaient la violence psychologique dans la relation mère/fille, entre copines ou au sein d’un foyer où une voisine tente de survivre dans un quotidien oppressant. D’autres tableaux étaient portés par une voix off masculine, volontairement machiste et caricaturale, débitant des clichés sur les femmes au volant, la place de la femme dans le foyer ou les soi-disant « devoirs » d’un homme. Cette présence sonore, volontairement intrusive, faisait écho à tout ce que l’on entend encore trop souvent.
Plusieurs scènes exploraient la violence sociale ou symbolique : des échanges entre garçons où l’homophobie ordinaire surgit sans même qu’ils en aient conscience ; une femme qui tente de se reconstruire après une relation toxique ; un frère dont la « protection » se transforme en contrôle ; un père qui rabaisse sa fille sur ses capacités et ses résultats scolaires. Dans chacune de ces situations, la même mécanique apparaît : la violence s’installe dans le quotidien, souvent sous couvert de normalité.
Les transitions musicales, choisies avec une grande sensibilité, amplifiaient encore l’émotion. Elles offraient au public des respirations nécessaires, avant de replonger dans une nouvelle scène tout aussi forte.
Autre moment marquant : la scène d’un père violent qui demande pardon après avoir frappé son enfant. Le personnage oscillait entre regret, culpabilité et autojustification, illustrant parfaitement la spirale de la violence et la difficulté de certains à se défaire de schémas profondément ancrés.
Plus tard, une femme en deuil révélait, presque malgré elle, qu’elle retrouvait un sentiment de légèreté à la mort de son mari. Sous le regard étonné — parfois accusateur — de son entourage, elle prenait conscience de la liberté retrouvée après des années d’emprise silencieuse.
Bien que composée uniquement d’acteurs amateurs, la troupe impressionne par sa sincérité et son engagement. L’absence d’artifice donne aux scènes une force brute, parfois déstabilisante, qui a profondément touché les spectateurs. Plusieurs d’entre eux confiaient à la sortie combien ce spectacle les avait boulversés preuve que l’émotion transmise dépasse largement la simple performance théâtrale.
Nicolas Gidaszewski
























