« Pendant que certains parlent, d’autres agissent… »
Ecrit Evelyne Couillerot à propos de la prise en charge de la dépendance des personnes âgées
« Il l’avait promis en 2007 ! La question de la prise en charge de la dépendance des personnes âgées serait un temps fort de son quinquennat. Depuis, les professionnels, les bénévoles associatifs, les Départements de gauche se sont mobilisés. Ils ont multiplié les réflexions, les propositions, les alertes même, face aux contraintes notamment financières qui dégradent progressivement les capacités d’accompagnement.
Il aura finalement fallu attendre février 2011 pour que le chef de l’État donne officiellement le ton du débat de la dépendance. Il l’a fait au Conseil économique et social environnemental, sous la présidence de Jean-Paul Delevoye et devant un auditoire trié sur le volet. Les aficionados de la majorité gouvernementale ont collectivement donné mandat pour un glissement rapide de la prise en charge financière de nos aînés vers un système assurantiel privé, alors qu’il est aujourd’hui financé par la solidarité nationale et départementale.
L’enjeu de société est immense et nécessite,sans dramatisation, une réelle et urgente prise en considération par les pouvoirs publics, alors il est préoccupant de voir comment le gouvernement hypothèque cette nouvelle réforme.
Préoccupant sur la forme : les annonces de concertation se multiplient. En réalité, les Départements et les acteurs sociaux professionnels ont été associés trois jours seulement avant les réunions organisées par le ministère. Nicolas Sarkozy lance officiellement les discussions au CESE sans avoir cru bon d’élargir le débat aux Départements qui portent à eux seuls 60% de ces dépenses de solidarité.
Préoccupant sur le fond également : aujourd’hui les Départements comblent en permanence les carences et les abandons de l’État dans tous les secteurs des solidarités publiques.
Le Département de Saône-et-Loire a fait face par ses propres moyens et grâce à la solidarité départementale dans l’attente du sursaut national. 1,2 million d’euros ont été affectés aux services d’aide à domicile à but non lucratif dans le cadre de plans de retour à l’équilibre, afin de préserver leur rôle essentiel auprès des personnes âgées.
Malheureusement, le projet de loi de finances vient de supprimer – sur proposition du gouvernement – les exonérations de charges sociales patronales dont bénéficiaient notamment les SAD, pénalisant une fois encore injustement ce secteur créateur d’emplois locaux au plus près de l’usager. Sans parler de l’injustice de cette mesure qui ferait débourser à une personne retraitée 130 euros (en moyenne) de plus par mois pour conserver son aide à domicile.
Devant l’urgence, le Département de Saône-et-Loire, qui avait déjà choisi d’aller plus loin pour répondre aux besoins du terrain en soutenant à hauteur de 3 millions en 5 ans les associations qui rendent le service à domicile, va compléter son dispositif de soutien. Il proposera dès le 11 février – et une nouvelle fois dans l’intérêt collectif – de compenser temporairement ce renoncement de l’État en soutenant les associations de services d’aide à domicile à hauteur de 500 000 euros, par des avances de trésorerie remboursables.
La Saône-et-Loire choisit la solidarité plutôt que l’individualisme inégalitaire et la met concrètement en œuvre. Mais que sera demain pour nos parents et grands-parents les plus fragiles si la montagne gouvernementale accouche d’une souris ? (Si le chef de file de la droite en France propose encore aujourd’hui, six mois après les premières attaques du rapport Rosso Debord contre le système, la prise en charge de la dépendance par les assurances privées ? Si notre pays entame le démantèlement du « modèle social français » pourtant éprouvé en temps de crise par le Conseil national de la Résistance ? ) »
Évelyne Couillerot
Première vice-présidente du Conseil général en charge des personnes âgées