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vendredi 21 janvier 2011 à 11:39

« Ces petites choses qui changent la vie »

Une proposition de loi de Didier Mathus adoptée en Commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale



On vient de l’apprendre : la proposition de loi de Didier Mathus visant à concilier la préservation et l’intégrité des œuvres culturelles et artistiques avec les objectifs de la loi contre le tabagisme a été adoptée ce matin à l’unanimité  en Commission des affaires culturelles de l’Assemblée nationale.


Cette proposition sera défendue en séance publique jeudi prochain lors de la journée d’initiative parlementaire réservée au groupe socialiste, proposition que voici :


« Ces petites choses qui changent la vie

 


L’hygiénisme normatif ambiant de notre société a conduit  à la remise en cause de l’intégrité des oeuvres culturelles et artistiques en investissant le champ d’application de la loi du 10 janvier 1991 (loi Evin). André Malraux, Jean-Paul Sartre et Jacques Tati ont ainsi, de manière posthume, fait les frais de ce néo-puritanisme.



Si les objectifs de santé publique de cette loi, toujours légitimes, ont notamment permis d’interdire l’incitation à la consommation du tabac, de trop nombreux exemples illustrent aujourd’hui les dérives, anecdotiques si elles n’étaient pas fondamentalement dangereuses, qui découlent de l’interprétation abusive de cette loi.


En 1996, un timbre à l’effigie du créateur des Maisons de la culture, à partir d’une photographie de Gisèle Freund, fut ainsi édité par La Poste en faisant disparaître la cigarette des lèvres d’André Malraux. En 2005, le catalogue de l’exposition de la Bibliothèque Nationale de France, consacrée à Jean-Paul Sartre, reproduisait une photographie du philosophe sur laquelle figurait un vide étrange entre ses deux doigts, en lieu et place de sa traditionnelle Boyard. En 2009, la régie publicitaire de la RATP choisit, sur l’affiche de l’exposition consacrée à Jacques Tati à la Cinémathèque française, de l’y faire figurer en substituant, à sa pipe… un ridicule et douteux moulin à vent.

Si les subterfuges diffèrent, les justification sont en tous points identiques: volonté d’interdire toute publicité indirecte pour le tabac, dans une approche conforme aux objectifs de la loi du 10 janvier 1991. Mais que dire de l’autre postulat sur lequel ces dérives se fondent? Véritables falsifications de l’histoire et de la censure des œuvres de l’esprit, ces dénégations du réel, rendues possibles grâce à la simplicité de la retouche photographique, ne devraient-elles pas rester la marque infamante des régimes totalitaires?

Au-delà du ridicule que ces pratiques illustrent, c’est l’historicité des oeuvres culturelles et artistiques qui est niée. A vouloir rectifier l’histoire, on l’aseptise. En rectifiant l’art, on nie son existence, comme sa possibilité. « Effacer un clope » des lèvres de Malraux, c’est la même démarche intellectuelle que celle qui consiste à vouloir draper d’une étoffe un nu: c’est se priver d’une partie de l’histoire. Rectifier, attenter à l’intégralité d’une oeuvre c’est aller à l’encontre de la préservation de son intégrité. C’est aussi le premier pas vers l’Art officiel, l’art sous influence.

Par conséquent, l’ampleur de la restriction de la liberté d’expression et de la réécriture de l’histoire devenant excessive et détournée au regard du but initial recherché par loi du 10 janvier 1991, c’est-à-dire la lutte contre le tabagisme, il convient de revenir à une lecture finalement plus « stricte » de la loi.

L’objectif de cette proposition de loi vise ainsi à concilier les exigences de la loi Evin avec la préservation de l’intégrité des oeuvres culturelles et artistiques, laquelle suppose de respecter le contexte, qu’il soit historique, sociologique ou politique, dans lequel une oeuvre culturelle et artistique voit le jour. Sur le plan pratique, l’article unique de la présente proposition de loi prévoit d’ajouter une exception à celles déjà contenues dans la loi Evin. »






3 commentaires sur “« Ces petites choses qui changent la vie »”

  1. Vila-nova dit :

    Sujet très important… les milliers de chômeurs de la région apprécieront le dévouement et le temps que passe leur député pour défendre des causes justes et qui intéressent tous le monde…

  2. parabellum dit :

    Alors que sa ville décline doucement , que les entreprises ferment ou diminuent leurs effectifs , alors que les hôpitaux de la CCM sont dans une impasse budgétaire dramatique, alors que , financièrement la ville vit à la limite de la tutelle… M.le Député Maire s’intéresse à « l’hygiénisme normatif de notre société »!

    A méditer.

  3. peluche dit :

    C’est quand même un événement exceptionnel : après 25 tentatives infructueuses notre député va voir aboutir un de ses projets de loi dont l’importance n’échappera à personne . Pauvres Montcelliens que nous sommes,nous ne sommes pas sortis de nos problèmes…..