Le service de remplacement chez les agricultrices et les agriculteurs
Hommes, femmes, mode d’emploi
Ceux et celles qui en ont bénéficié, ne le regrette absolument pas. L’essayer c’est l’adopter, en quelque sorte. Le service de remplacement chez les agricultrices et les agriculteurs est une véritable bouffée d’oxygène quand le besoin se fait sentir. Il faut néanmoins bien faire la distinction entre les agricultrices et les agriculteurs. Certes, le service est semblable des deux côtés mais est géré par deux entités différentes. Chaussez vos bottes et suivez le guide !
Honneurs aux dames
Vous pouvez être femme d’agriculteur mais aussi femme et agricultrice et c’est déjà plus compliqué « parce que nous avons notre travail sur l’exploitation et celui d’une femme d’intérieur » note avec mesure Marie-Pierre Martin. Depuis un an, elle préside aux destinées du service de remplacement féminin sur un secteur qui englobe Palinges, Toulon-sur-Arroux, Charolles, Gueugnon, Paray-le-Monial, Digoin, Saint-Bonnet-de-Joux, Montceau-les-Mines ou encore La Guiche, Pouilloux, Saint-Berain-sous-Sanvignes. Un territoire vaste mais, qui hélas, compte très peu d’adhérentes. « Nous en avons une cinquantaine, ce n’est pas énorme » admet la présidente. Elle-même n’a adhéré que tardivement. Mieux vaut tard que jamais !
« Si j’avais connu ce service de remplacement, je l’aurais utilisé pour la grossesse de mon troisième enfant » reconnaît-elle aujourd’hui puisqu’elle exploite avec sa belle-sœur un troupeau de 130 chèvres alors que son frère s’occupe de 90 vaches allaitantes et 6 normandes à Saint-Berain-sous-Sanvignes.
Le service de remplacement féminin a sa spécificité car il concerne les agricultrices aux manettes d’une fromagerie, font la traite des chèvres, abattent des volailles et transforment la viande charolaise. « Nous avons toutefois deux adhérents masculins qui font des fromages » signale au passage la présidente. Pas de misandrie. Autre particularité de cette association, elle est la seule en France. Il n’en existe pas d’autre.
Pour assurer les remplacements, elles son quatre, un CDI (lire ci-dessous) et trois CDD. « Je tiens à souligner leur conscience professionnelle. Les filles travaillent comme si c’était leur propre exploitation. Voilà pourquoi le service fonctionne bien » souligne Marie-Pierre Martin. Manque seulement des adhérentes. « A nous de développer notre service, le faire connaître ».
Isabelle Carissel, 28 ans au service de remplacement
Elle a toujours le sourire, voilà un gage de qualité pour les fromages de chèvre qu’elle confectionne au Gaec Mathieu-Chevalier à Saint-Vincent-Bragny. Isabelle Carissel est en CDI et va de ferme en ferme. Une demie journée par-ci, une journée par-là. « De mars à septembre, c’est la grosse période. Hier j’étais à Saint-Laurent-en-Brionnais, après à la Clayette, la veille encore aux Bizots » explique-t-elle. Et après les fromages, il sera l’heure de traire les chèvres. Bref, elle ne chôme pas. « Parfois je vends aussi les fromages aux clients de passage ». Son contrat est de 35h par semaine, travaille le samedi matin et parfois le dimanche « mais c’est exceptionnel ». A son regard, on comprend que le bonheur n’est pas que dans le pré, il est aussi intérieur.
Au Gaec Mathieu-Chevalier, Marie-Pierre, fait appel au service de remplacement régulièrement, à chaque fois pour ses congés maternité ou en renfort. « Avec trois enfants, j’ai ainsi plus de souplesse pour m’en occuper, surtout le mercredi ».
A vous messieurs
La rencontre a lieu à Palinges. Ce soir-là, les responsables du service de remplacement tiennent conseil sous la présidence d’Hervé Fraizy. Ce service est très répandu dans notre département, « on en compte 17 » précise-t-il. « Nous, notre rayon d’action prend effet sur l’ancien canton de Palinges (Oudry, Saint-Vincent-Bragny, Saint-Bonnet-Vielles-Vignes, Saint-Aubin, Grandvaux, Martigny-le-Comte et Palinges) ». Un service très répandu mais pas nécessairement très utilisé avec seulement 62 adhérents, ce qui représente néanmoins 55% des exploitations. Toujours est-il que deux employés à plein temps « tournent » sur les exploitations bovines essentiellement alors qu’un troisième, en CDD, s’active en fonction de la demande.
Autant les agricultrices sont demandeuses du service de remplacement, autant les agriculteurs sont moins enclins à en bénéficier. « Il y a du travail mais c’est la trésorerie qui manque dans les exploitations » souligne Hervé Fraizy. Il ajoute : « Avant, dans l’agriculture on se serrait les coudes, les voisins ou un parent venaient aider. Aujourd’hui, tout le monde a le nez dans le guidon surtout quand l’agriculteur est seul sur l’exploitation ». Mais quand le coup dur survient, maladie ou blessure, l’adhérent peut ainsi se faire remplacer. Forcément il lui en coûte de l’argent, pas loin de 140€ pour une journée (un peu moins chez les agricultrices) même si des aides existent. En plus de l’adhésion (50€, toujours un peu moins côté féminin), il est nécessaire d’avancer deux journées de travail (une seule chez les dames).
« Il faut que les agriculteurs comprennent que ce service de remplacement c’est comme une assurance. Quand un pépin arrive, vous êtes couverts » lance le président. « Parfois, nous leur forçons un peu la main pour qu’ils fassent appel à nos employés ». Des employés justement capables de remplacer le chef d’exploitation. « Ils sont pour nous d’une valeur inestimable, ils sont très consciencieux ».
Il n’empêche que le président Hervé Fraizy, comme son homologue Marie-Pierre Martin, aimerait davantage d’adhésions. Là également la question se pose : comment faire ?
Clément Mathieu, au service remplacement en CDD
Il est tout jeune, 20 ans, avec un BTS agricole en poche mais ces derniers temps, Clément Mathieu pointait au chômage. Et le voilà en CDD au service remplacement, il a du travail jusqu’au 6 mai. Nous l’avons rencontré au Gaec Michel à Saint-Vincent-Bragny, il remplace Christophe Michel, en congé paternité. Ce jour-là, il va poser des clôtures pour les moutons. « C’est l’époque » dit-il, heureux d’enfourcher son tracteur. Même s’il doit savoir se débrouiller, au moins dans un Gaec, il n’est pas seul et il poursuit, pour ainsi dire, sa formation entouré des aînés. Ses horaires : 8h – 12h et 14h – 18h et repos le week-end.
Au Gaec Michel, « mes parents faisaient déjà appel au service remplacement » rapporte Arnaud Michel, membre des Jeunes agriculteurs de Saône-et-Loire. Alors il n’hésite pas à se faire remplacer quand il part en réunion.
Jean Bernard