Faits divers : Montceau-les-Mines
Dénonciation mensongère d’un genre particulier
Cette dame souffre. Elle souffre beaucoup mais ne sait pas quoi faire avec ce qui l’envahit, alors elle s’automutile, elle se scarifie, elle se blesse. Elle a été jugée ce 23 mai en comparution sur reconnaissance préalable de culpabilité (CRPC), et pourquoi ?
Eh bien c’est en lien avec sa souffrance et ses conduites auto-agressives, car elle a la chance, dit-elle de vivre avec son bon ami, à Montceau, mais « pour se dédouaner aux yeux de son ami, elle invente », explique le bâtonnier Seriot qui l’assiste. Elle invente quoi, quand il lui a pris de s’infliger des blessures ? Elle invente qu’elle a été agressée.
C’est ainsi qu’elle a appelé la police, en octobre dernier. Et la police s’est déplacée, et la police a recueilli sa plainte et son récit. Puis la police a relevé quelques incohérences entre l’histoire racontée et les constations. Finalement, un peu plus tard, la femme reconnaît avoir menti.
Une dénonciation mensongère d’un genre particulier
La prévenue est donc poursuivie pour dénonciation mensongère, mais pas du même type que celle qu’on a vue la semaine dernière (https://montceau-news.com/faits_divers/784739-faits-divers-montceau-les-mines-39.html). La matérialité des faits est la même (induire la police en erreur et lui faire perdre son temps) mais l’intention… l’intention n’est pas la même du tout.
Devant l’océan de son malheur et sa démarche d’aller (enfin) consulter un psychologue au CMP de Montceau, le procureur de la République a abandonné les poursuites sur trois faits antérieurs pour s’en tenir au 20 octobre dernier.
Peine proposée : un stage de citoyenneté, à ses frais
Quand on le voit à la barre, elle vient de rencontrer le procureur de la République dans un bureau, assistée de son avocat. Après examen du dossier et échange avec elle, le procureur a proposé une peine de stage de citoyenneté, à ses frais (une grosse amende est fixée, en cas de non-exécution).
La prévenue perçoit le RSA et aimerait bien travailler, dit-elle, parce que ça l’aiderait à être « plus zen », « plus calme ».
Cette petite femme qui se tient droite a surtout besoin d’aide
Il n’échappe évidemment pas à la présidente Croissandeau que cette petite femme qui se tient droite devant elle, a surtout besoin d’aide. Au casier judiciaire, une condamnation ancienne, par une cour d’assises des mineurs, pour complicité dans un crime dont la nature a imposé que la jeune fille soit inscrite au FIJAIS. C’était il y a une vingtaine d’années. Il y a plus de dix ans, la femme oublie de déclarer son changement d’adresse. C’est une violation des obligations auxquelles contraint l’inscription au FIJAIS, et ça entraîne une seconde condamnation. C’est tout, pas d’autres mentions au casier.
Sa vie, comme « une nuit interminable »
Maître Seriot parle d’un contexte de dépression, « pas nouveau ». Il souligne que le 20 octobre c’est la date à laquelle madame a perdu son père, « seul phare dans sa vie », sa vie comme « une nuit interminable ». Aux violences vécues dans sa jeunesse succèdent des violences maritales. Et, alors qu’elle fréquente actuellement un homme en qui visiblement elle a confiance, elle veut lui masquer la violence avec laquelle elle retourne contre elle des choses qu’elle ressent, qui l’envahissent et qu’elle ne peut pas contrôler. Si mener son existence était simple, ça se saurait.
« Effectivement, un suivi psychologique est indispensable, sur un temps long »
« Elle a besoin d’un sérieux accompagnement psychologique, conclut l’avocat. Elle est allée au CMP sur impulsion de son ami. La sanction de stage de citoyenneté n’est pas la plus adaptée aux besoins de madame, mais c’est une réponse pénale. »
La présidente de l’audience d’homologation des peines marque son accord : « Effectivement, un suivi psychologique est indispensable, sur un temps long. » Le souci de la juge c’est que la prévenue aille vraiment se faire suivre, ne serait-ce que dans son intérêt. Où peut mener pareille expression de sa souffrance ?
Elle promet qu’elle ne reculera pas devant les rendez-vous au CMP
Mais la femme pleure. Elle a entendu son avocat dire pour elle des mots qui reconnaissent ce chemin de calvaire qu’est son existence. Elle en pleure mais se ressaisit rapidement. Assure la juge qu’elle ne laissera pas tomber les rendez-vous au CMP. Elle justifie pour l’instant d’un seul rendez-vous. « Sans cette attestation, madame, le tribunal aurait penché pour une peine de sursis probatoire avec une obligation de soins. Vous ne pouvez pas rester seule… »
La présidente homologue la peine, s’adresse une dernière fois à la petite femme qui se tient droite : « Vous avez requis des services de police pour des faits qui n’existent pas. Ce n’est pas acceptable, d’où le stage de citoyenneté. Mais après, il y a vous : vous avez besoin de soins, sur un long temps. »
FSA